Fête foraine

Le festival du vomi semblait s'être enfin achevé.

L'attraction s'arrêta finalement pour laisser ses passagers descendre dans le calme le plus absolu. Oui, c'était calme. Cela dit, ça l'était seulement si on oubliait les hurlements des enfants, les réprimandes de leurs parents et les injures du reste. Mais, sinon c'était la paix dans le monde.

- Oh, quelle délicieuse journée.. Hum, un morceau de saucisson. Lachais-je à l'attention du type masqué avant de déguérpir à toute allure en direction des toillettes.

La fille que j'avais abordé un instant plus tôt était désormais hors de mon champs vision. Elle c'était en aller en courant vers je-ne-sait-où, comme à peu près tout les autres passagers du navire. Dommage, je n'aurais jamais eu la chance de lui montrer mon petit tour de magie. Et dire que j'avais préparé une rose et quelques piéces d'argents rien que pour mettre au point ce tour de passe-passe.

Oubliant ce simple détail, et ignorant la fleur rougeâtre toute froissée qui menaçait de tomber de mes poches, je mis les pieds à l'intérieur des toilettes pour hommes et y régla vite fait mes petites affaires.

La salade italienne que j'avais sur la tête faisait désormais partie du passé. Adieu, saucisson. Adieu, liquide verdâtre dont je ne pourrais jamais connaître l'origine.

Affalé sur un banc bien à l'abri du soleil. Les cheveux mouillés, la jacket également humide, déposée sur mon épaule. Un chat m'adressa la parole.

- Mike Law, tu as un potentiel très intéressant. J'aimerais que tu passes un contrat avec moi, qui te permettra de...

Je n'eu même pas le temps de m'exclamer devant cet étrange phénoméne que, soudain, une énorme bourasque vint me faire voltiger dans les airs comme un parasol mal planté.

- IL  A DIT QUOI CE PUTAIN DE CHAT ?!!!

Fête foraine

Après un atterrissage des plus violents, ma face finit enfin par rencontrer la caillasse. Quelques griffures étaient visibles par-ci et par-là sur mon visage. Peut-être sur mes bras également, mais je n'avais pas pris le temps de vérifier. Ne porter rien d'autre qu'un sous-vêtement blanc, humide, n'aidait pas beaucoups à se protéger du choc.

Rapidement, je me remet sur mes pieds afin d'examiner les parages.

*C'est... Vide ?*

Quelque chose ne tournait pas rond. Tout le monde avait disparu. Pratiquement tout le monde. Il ne restait plus qu'une petite poignée de personnes aux alentours. Où avaient-ils donc tous passé ?

- Okay... Lachais-je en passant mon regard sur les trois visages qui étaient devant moi.

Une rapide analyse de la situation me permit de remarquer ceci : Primo, une fille était entrain de courir au loin. Ca, c'était normal, vu le lieu où on était. Deuxio, une seconde fille était entrain de s'interposer entre la première fille et la troisiéme personne. Tertio, la troisiéme personne était le gangster du nom de David, et il pointait deux haches vers miss 1 et miss 2.

*Donc, si je suis bien, lui, il veux les tuer elles. Et elle, elle veux protéger l'autre. Et l'autre, elle veux partir là-bas.*

- Hum...

Ça avait l'air compliqué par ici. En vérité, cela faisait un bon bout de temps que j'avais abandonné l'idée de comprendre ce qui ce qui passait dans le coin, depuis le moment où le chat s'était mis à parler en faite. Je me contentais de contempler le vide, et d'attendre de voir ce qu'allait faire le français avec ses deux haches de guerre pointées sur ces deux demoiselles. L'instant d'après, un coup de feu émana des deux armes blanches du gangster. Mettant par là-même, mes sens en alerte. Et guidant instinctivement ma main droite vers mon arme qui était logée dans mon dos.

Alors que je commençais à peine à braquer mon arme sur lui. La réponse à ma première question me fut donné par ce fameux chat noir.

Du charabia incompréhensible sortit de la bouche d'un animal qui ne devrait même pas posséder de corde vocal. Mon esprit décida de laisser tomber la logique et d'ignorer le chat pour faire face au vrai danger. Le meurtier.

- Holà, David ! Comment ça va depuis la dernière fois ? Les affaires marchent bien ? Le marché du meurtre d'enfant détonne en ce moment, à ce qu'il parait.

Je n'avais aucune envie de lui tirer dessus. Absolument aucune. L'arme qui était cabrée sur lui était là juste pour faire pression. Tout ce que je voulais, c'était de comprendre ce qui lui prenait à tirer sur des femmes en plein centre d'une fête foraine. J'espèrais au fond de moi qu'il n'avait pas perdu le ciboulo. Ça aurrait été... Facheux.

Fête foraine

Un hurlement d'agonie attérrissa jusqu'à dans mes oreilles, puis des jurons furent relachés en plein air. Les deux tirs de David semblaient avoir fait mouche. J'ignorais encore plein de choses sur ce qui se passait ici. Je ne savais pas par quelle miracle ce chat pouvait bien m'adresser la parole, ni comment j'avais été propulsé jusqu'ici, ni où avait disparue toute la clientéle de la fête foraine. Et, plus important encore, je n'avais absolument aucune idée des enjeux de cette situation.

Cependant, mon ouïe était plus que suffisante pour guider mes actions. Ces deux femmes criaient de douleur. Et David était la source de leurs maux. Plus que cela encore, l'une des deux bléssée était toujours dans son champs de tir. Plutôt que d'attendre et de regretter de n'avoir rien fait, je préférerais encore m'interposer dans ce massacre et d'ensuite penser aux regrets.

Mon index se posa lentement sur la gachette, j'hésita l'espace d'un clin d'oeil, avant de presser la détente d'un mouvement assuré. Alors que la cartouche se faisait éjecter hors de la chambre. Mon corps commença rapidement à se déplacer en direction de la blessée qui n'était pas partit se cacher. Je devais couvir ses arrières le temps qu'elle se mette à l'abri. Et au passage, je devrais aussi mettre mes fesses en lieu sûr.

Fête foraine

Le temps que ma balle parte vers sa cible et que mon corps se dirige vers la demoiselle en détresse, un petit élément attira mon attention. Une faux. Cette arme, si atypique pour notre époque, se tenait entre les doigts de la jeune fille que je voulais sauver. Je suppose que normalement, en voyant ce genre de chose, notre esprit devrait commencer à se poser tout plein de question. Seulement, en ce moment précis, je trouvais ça particuliérement normal pour ce que j'étais entrain de vivre. Oui, après tout, personne n'étais gêné par ça, c'était normal pour tout le monde, alors, ça l'était également pour moi.

D'ailleurs, moi aussi, je savais faire apparaitre des choses de nul part. Des fleurs et piéces de cinq centimes ! Je leurs aurraient volontiers montré mes tours de passe-passe. Mais, la situation ne semblait pas être adéquate pour cela. De plus, je doute fort que cela marche bien lorsque l'on a uniquement un seul bras valide.

Agenouillé, le visage tordu par la douleur, je faisais de mon mieux pour resserer ma poigne sur ma blessure. Mon revolver était tombé par terre. Il était juste à mes pieds. Cependant, il m'était inatteignable à cause de ma blessure. La transpiration commençait à devenir de plus en plus insupportable. Et ma respiration commençait à se saccader. Douloureusement, ma voix s'éleva à l'attention de celle qui venait de fermer ses yeux.

- Ouvre les yeux et dégage de là ! Va-t'en, maintenant !

Fête foraine

La petite fête prenait de plus en plus d'ampleur. Une troisiéme fille sortit de nul part afin de protéger les deux premières demoiselles face aux tirs de David. Elle était brune, les yeux azurin et les bras armés d'un énorme canon. Charmant. Les cheveux, je veux dire.

Remarquant que ma présence se faisait de plus en plus oublier. Je me permis de me relever tout en gardant ma poigne sur ma blessure puis de me mettre tout doucement sur le côté. Mon petit doigt me disait que ce grand canon n'était pas là que pour faire joli. Et les coup de feu qui commencaient à en émaner ne semblaient pas être faux non plus.

- Je pourrai en avoir un des comme ça ?

Ignorant si ma voix s'était faite entendre entre tout ces coups de feu, je continuais toujours à marcher à reculant afin de ne pas gêner mes compatriotes dans leur rituel.

Fête foraine

Les oreilles sifflantes, et la blessure piquante. J'entrevoyais entre ma sueur, une silhouette féminine qui se rapprochait de moi en boitant. Elle voulait m'offrir des explications à ce qu'il parait. Juste comme ça, sans que je n'ai eu rien à lui demander ? Qui plus est, elle venait vers moi au même moment où son amie est entrain de dézinguer l'autre gangster, juste dans son dos. Je savais que mes sens n'était pas tout à fait opérationnel en ce moment. Mais là, c'était clair comme de l'eau de roche. Il y avait anguille sous roche.

Après tout, des femmes ayant affaire à David Desange ne pouvaient pas être totalement blanches comme neige.

- Je serais ravi d'entendre tes explications, miss. Cependant, est-tu sûre que c'est le bon moment pour faire ça ? Je veux dire, ta copine viens de te demander un coup de main, il me semble. Je parle bien de ta copine qui est équipée d'un énorme minigun et qui est entrain de s'en servir pour trucider un homme.

Il ne fallait surtout pas oublier ce détail. Le canon. Très important. Une fois mes mots prononcés, je tendis ma main gauche dans la direction de la jeune afro-americaine, puis ouvrit la paume en l'air

- Mon flingue. Si tu le permet. Lui dis-je avec un ton neutre.

C'est alors que le chat réapparu à mes côtés. Ce félin qui était doté du don de la parole me demanda de lui faire part d'un voeu. Ma réponse fut instantanée.

- Un voeu ? Je souhaite qu'on me donne des réponses, mon grand. C'est possible ?

Mon ton était ironique, mais également colérique. Je jouais leur jeu, mais je commençais un peu à me perdre dans mes émotions. Je me retourna une dernière fois vers la demoiselle qui me faisait face pour lui lacher sur un ton encore plus autoritaire que la dernière fois.

- Mon arme !

Fête foraine

Même en fouillant aux tréfonds de mon esprit, aucun début de réponse n'émergeait en moi. De la lumière était apparut, le chat noir sauta sur moi. Puis, il me poignarda avec ses longues oreilles pointus droit dans le coeur. Après quoi, mon corps se mit à absorber la lumière environnante jusqu'à ce que tout redevienne comme auparavant. Tout cela semblait s'être passé dans une autre dimension. C'était comme si, tout autour de moi, le temps s'était figé et que seuls moi et l'étrange félin existions dans cet autre monde.

L'animal continuait à me parler de choses dont j'avais du mal à comprendre. Il citait des noms ainsi que des mots-clés que mon esprit s'efforçait à assimiler dans l'espoir de comprendre ce qui venait de se passer, en vain.

*Les prédateurs et leurs proies.*

Il m'était difficile de cerner les enjeux de la situation dans laquelle je m'étais retrouvé. Seulement, s'il y avait bien un mot qui pouvait résumer ce dont j'étais entrain de témoigner, ce serait bien le mot «guerre». Je n'étais pas aveugle, je voyais bien que tout autour de nous, les gens étaient entrain de se battre, de s'entre-tuer. Je ne savais pas pourquoi. Peut-être même qu'il n'y avait pas de raison, que c'était quelque chose de stupide ou alors quelque chose de primordiale. Le plaisir, un mal-entendu ou la survie.

L'observateur que j'étais il y a quelques secondes de cela, était désormais devenu l'un des leurs. Son ennemi à elle, et son allié à lui.

Ma main qui était tendue dans la direction de l'afro-américaine s'ouvrit tout doucement. J'avais la sensation de pouvoir faire apparaitre un objet entre mes doigts, une arme. Une arbaléte de chasse. Cette dernière ne tarda pas à répondre à mon appel, et à venir m'aider à mettre en joug ma proie.

- ...

Sans rien ajouter de plus, mon doigt pressa la détente, et le carreau fut relaché en direction du bras armé de la jeune femme. Ses mots m'avaient aidés à mettre de l'ordre de mon esprit. Elle l'avait dit elle-même. Si elle me rendait mon arme, elle allait mourir. Elle était donc mon ennemi.

Les enseignements de Glen raisonnaient encore dans mon esprit. Ses leçons de survie étaient simples : Tirer d'abord, réfléchir ensuite.

Elle aurait dû me rendre mon arme.

Fête foraine

Nephil. D'après le félin, ce mot définissait ma nouvelle nature.

Je tentais de garder mon esprit fixé sur ces six lettres alors qu'un énorme râle de douleur émanait de ma bouche. En cette instant, une partie de mon corps venait de m'être ôtée. Laquelle ? Ça, j'étais trop mal en point pour le vérifier.

Mon regard continuait de suivre les mouvements de la jeune femme, et mon arbalète en faisait de même. Elle gardait le silence, alors je suivais son exemple.

J'appuyais une seconde fois sur la détente. Ciblant cette fois-ci le sol à côté de sa tête. Avec un peu de chance cela la déstabiliserai suffisament pour que je puisse me rappocher d'elle et immobiliser son bras droit en l'écrasant avec mon pied.

Fête foraine

La douleur me fit tomber lourdement sur mes genoux. Mon coeur continuait à battre la chamade et mon visage se couvrait de plus en plus dans sa sueur.

Je gardais toujours la femme dans mon champs de mire, une seconde d'inadvertance et j'étais mort. Mais, j'avais cessé de tirer sur elle. Je n'en avais plus la force.

A la place, je me contentais de la regarder droit dans la yeux, et de prononcer ces quelques mots entre deux grognements de souffrance.

- Ne tire pas.

Je n'allais tout de même pas me faire tuer par ma propre arme, si ?

Fête foraine

La demoiselle au teint sombre ne semblait, finalement, pas être aussi béliqueuse que mon esprit embrumé l'avait intérprété. Elle avait baissée son arme lorsque je le lui avait demandé, ce qui prouvait qu'elle avait un bon fond.

Peut-être que finalement David était le seul scélérat dans cette histoire ? Lui, et sans oublier "miss gros canon".

D'ailleurs, le combat de ses deux-là semblait faire rage à côté. J'avais l'impression que tout ce que je faisait depuis tout à l'heure était de faire joujou avec un petit jouet lorsque ce que je voyais l'acharnement de leur lutte. Le choc des titans d'un côté, et les enfants qui se tortillaient dans la boue de l'autre.

Mon premier réflexe lorsque le français fut projeté vers la brune fut de me remettre sur pied, et de boitiller -à toute allure- dans le sens inverse. Comme ça, il n'y avait aucun risque à ce que je me prenne des balles perdues de la part de l'autre femme.

Mon plan se résumait en deux mots : Me planquer. Hors de question de tirer sur cette malade.

Fête foraine

Un petit coup d'oeil vers l'arrière me permet de remarquer la brune de tout à l'heure se faisant maltraiter par David, mais aussi par sa présumée alliée. Conclusion, ma première impression sur "miss gros canon" était la bonne.

Mon, très léger, sens de la justice me fit un petit pincement au coeur alors que j'abandonnais cette bonne femme à son sort. Et pour ne pas faciliter le tout, non loin de moi, je pouvais voir des gamines se faire attaquer par énorme serpent. D'autres nephil ? Ou alors était-ce leurs proies ?

Qui est qui, ça je m'en foutais. La vies des gosses était en jeu, et en tant qu'être humain, je ne pouvais pas laisser ça se passer devant mes yeux. Mais, d'un autre côté, aller sauver les gosses signifierais laisser tomber la femme.

- Bordel.

Une nouvelle explosion retentit, éloignant David de la brune. Je décide alors d'agir. Rapidement, je me dirige vers la femme puis l'aide à se redresser.

- Je ne sais pas pour toi, mais moi, je n'ai pas très envie d'aider mon allié. Alors, je te propose de laisser ces deux-là se débrouiller seuls et d'aller sauver les gosses. Lui dis-je, le doigt pointé vers leur direction.