Je n'ai pas réussi à décocher un mot du trajet. Encore à la fois sonnée et fatiguée, je me suis laissée bercée par le ronronnement du moteur et la présence de David. je tente de retrouver un calme qui me fuit encore, jouant nerveusement du bout des doigts sur le paquet remis pas Sebastian. A l'écriture sur le papier kraft, je sais qu'il vient de Mère et ce geste de sa part m'inquiète un peu. Aussi, je choisis de le laisser fermer pour me moment. D'ailleurs, nous arrivons au Manoir Klee.

Rentrons. On nous attend.

"- Il va y avoir tant de monde que cela? J'espère que je ne fais pas trop peur, je sais pas trop quelle tête j'ai à présent."

Je tente un sourire un peu hésitant mais présent. Je dois encore avoir les yeux rougis et le visage un peu marqué par les larmes que j'ai versé. Mais ce lieu me parait malgré tout plus accueillant que celui que je viens de quitter. Même le dernier salut de Sebastian m'avait apparu triste, était-il sincère, lui au-même? Maintenant, j'en viens à douter de tout. Ma main vient serrer celle de David, pour me rassurer et rester forte. Pourvu qu'ici, cela se passe bien.

Ne t'en fais pas. une dizaine de personnes au plus, mais ce ne sont pas des invités très protocolaires. C'est juste que les gens de la maison en font un peu partie, chez nous. On va se changer avant de passer à table. 

Ainsi, tout le monde pouvait manger ensemble? Je trouvais l'idée un peu surprenante sur le coup mais finalement, n'était-ce pas cela le principe même d'une famille? Je salue à peine Anthony au passage avant de suivre David jusqu'à sa chambre. Il n'y aurait pas eu Famas et la peluche de Little River, je n'aurais jamais pu deviner qu'elle était la sienne. Et un second matou, immaculé, relève le nez en même temps, un peu curieux de ma présence.

Tiens, voici Cute. Si tu veux, tu peux te débarbouiller là-bas. Et on peut demander à Judy de te passer des vêtement si tu veux te changer. Sauf si tu préfères les miens.

"- Les tiens feront parfaitement l'affaire. Si tu acceptes de me les prêter. Je n'ai pas envie de déranger Judy." 

Tu peux t'habiller confortablement, les bébés ne doivent pas être serrés, tu le sais. Aussi officielle que soit l'annonce, tu n'as pas à te faire souffrir pour ça, chez moi.

"- Vu ta taille et la mienne, même enceinte, je devrais pouvoir flotter dedans encore un peu. Et comme ça, ils auront un peu de leur papa avec eux. C'est tout aussi bien je trouve."

Je souris légèrement en venant caresser les deux chats. Famas semble me reconnaître et je suis contente de voir qu'il va bien. Cute me parait vaguement familier mais en même temps, des chats blancs, ce n’est pas si rare. Puis, je demande à David où se trouve ses affaires avant de venir prendre un t-shirt et un jogging, dans les tons gris et bleus avant d'aller me rafraîchir dans la salle de bain.

L'air fraîche me fait du bien et même si mes yeux restent un peu rougis, je reprend une apparence quasiment naturelle. Après tout, ne suis-je pas passe maître dans l'art de l'illusion? Je pousse un soupir, les bulles dans mon ventre se réveillant depuis quelques temps. Vous auriez faim, vous? Oui, on y va ne vous en faites pas. Je quitte donc la salle de bain pour revenir dans la chambre et venir quelques instants me blottir dans les bras de David dont j'ai l'impression de ne plus pouvoir me passer. Il est le seul qui me permette de rester encore debout.

"- Voilà, je suis prête. J'espère que je n'aurais pas trop fait attendre le reste de la maisonnée."

Bah, s'ils en ont eu marre d'attendre, ils auront commencé sans nous.  

Je rigole un peu tandis que je me sens quitter le sol sous la poigne solide et rassurante de mon fiancé. Dans ses bras, je ne crains rien ni personne et cette seule pensée suffit à me rassérénée. Car il faut bien admettre qu'après ce qu'il vient d se passer chez, partager un repas avec sa famille m'inquiétait un peu. Mais ici, il était Chef et Maître tout puissant alors, je pouvais m'en remettre à lui. Alors que notre étreinte prend fin, je viens saisir le bras qu'il me tend avant de le suivre jusqu'à la cuisine.

La pièce est claire et l'ambiance y est joyeuse. La table est longue et remplie, alors que les conversations vont bon train, sans doute sur un peu tout et rien. cela n'a rien à voir avec ce que j'ai pu connaitre chez moi. Les gens sont tous déjà en train de manger, la famille officielle mélangée aux hommes de mains. Ce que je trouve surprenant mais en même temps assez agréable. Ici, pas de visages austères même si certains m'observent avec curiosité alors que je le salue discrètement les gens présents en même temps que David.

Nous nous installons à des places libres et déjà, des assiettes semblent voler jusqu'à nous, pleines et agréablement parfumées. J'observe le tout, avec un mélange de gêne et de fascination. Je ne suis pas habituée à une telle animation, le silence et le calme ayant toujours régné en maître autour de moi pourtant, je dois bien admettre que ce n'est pas désagréable même si j'ai du mal à trouver ma place ici.

J'espère que le bruit ne te dérange pas trop. Il est encore difficile de les faire se calmer.

"- Pas de soucis. C'est juste que... Je n'ai pas l'habitude mais je trouve ça plutôt sympathique, de voir tout le monde ainsi réuni. "

Nerveusement, mon pouce joue sur l'anneau à mon doigt. Sa présence aussi est nouvelle mais j'ai l'impression de ne déjà plus pouvoir m'en passer. En tout cas, les arômes se dégageant de mon assiette finissent de réveiller les deux monstres qui se font un plaisir de me rappeler leur existence. Si cela ne tenait qu'à moi, je ne mangerais pas, la gorge encore nouée de ce que je venais de vivre, mais je n'avais pas le droit de me montrer aussi égoïste. Alors, je commence à picorer, un peu timidement, comme toujours.

"- Hum... C'est délicieux en tout cas. Tu as un excellent chef cuistot."

Je souris doucement, me concentrant sur mon assiette et sur David sans parvenir à vraiment prêter attention à ce qu'il se passait autour de moi. Mis à part certains regards que je sens s'attarder sur ma présence, je ne suis pas le centre de l'attention et cela m'arrange. Je crois que j'ai encore besoin d'un peu de temps pour souffler.

Ah! Missié! Même votre amie elle aime ma cuisine! vous devriez en manger plus! Vous êtes tout maigre!

Ça , mon pauvre Joe, c'est sans doute ce que je lui répète depuis qu'il est gosse. Mais il est difficile! 

Mais c'est vrai qu'il est maigre, Monsieur David! J'ai beau repriser ses costumes, il nage toujours dedans! 

Il parait qu'il y a quelque chose qui permet aux hommes de se remplumer, non? 

Ah ! Et ça je refuse de m'y coller! 

Si au début leurs réflexions m'avaient parues drôles et très légères, elles prennent rapidement un tout autre ton à mon oreille. Bon, ce n'était pas la première fois que l'on me voyait avec lui mais là, il était vrai que cela faisait beaucoup en peu de temps. Et après être venue parée d'une robe ma foi assez féminine pour m'en faire oublier que je faisais croire si facilement être un garçon, me voilà vêtue de ses propres vêtements. En tout cas, je n'arrive plus à toucher à mon assiette, me sentant un peu prise au piège en cet instant. Tellement que je sursaute lorsque Judy enchaîne à son tour.

Oooh! Naoto! Quel magnifique bijou! Il est juste exquis!!! 

Oh non, pas elle. Elle ne va pas s'y mettre non plus? Il ne manquerait plus que Sam et Steven et  le tableau sera complet. En tout cas, certains semblent bien s'amuser de la situation. Et David n'en mène visiblement pas plus large que moi, ce qui me fait plaisir dans un sens, m’arrachant presque un sourire.

Tu leur dis? Ou j'annonce?

"- Leur annoncer quoi? "

Oui, je me moque. J'ai très bien compris le message même si en général je suis du genre très lent à la détente. Mais là, j'aurais eu du mal à ne pas voir la vérité en face. Je me lève de ma chaise avant de saisir ses mains et d'en exposer le reste de leurs blessures aux yeux de tous, ce qui un instant ramène un silence presque irréel dans la salle.

"- Eh bien, après s'être méchamment abîmé les mains à me confectionner cet anneau unique en son genre, il semblerait que votre irresponsable de Chef ait décidé que son avenir passerait par le fait de se bousiller la santé à me supporter jour et nuit. "

Oui, cela n'avait rien d'aussi poétique que le demande de Judy à Anthony mais au moins, c'était dit. Maintenant qu'ils avaient ce qu'ils voulaient, avec un peu de chance, chacun retournerait sagement à son assiette. Ou pas. En tout cas, je réalisais avec une certaine tristesse que même en étant une inconnue ici, je me sentais mieux entre ses murs que dans ma propre demeure.

Aux futurs mariés !

Aux futurs mariés !!!

Apparemment, la nouvelle ravi tout le monde et je ne peux empêcher le rouge me monter aux joues. Je ne suis pas encore très à l'aise dans cette ambiance mais c'est malgré tout très agréable. Mais déjà, c'est le champagne qui apparaît devant nous alors que les coups pleines sont distribuées. Des restes des fiançailles de Judy et Anthony? je ne sais pas pourquoi, mais j'en doute.

T'as même prévu le champagne. Et si je n'avais pas réussi à convaincre les parents? Tu aurais fait quoi? 

Toi? Ne pas réussir? Quelle question. J'aurais démissionné...

T'es dur en affaires! 

Toi aussi. Donc tu aurais forcément réussi.

A cette évocation de mes parents, je ne peux cependant pas retenir l'expression de profonde désillusion qui me gagne quelques instants. Convaincre mes parents. Non, je ne veux plus y repenser, ce souvenir m'est encore trop douloureux. Tellement que je ne fais même pas attention au fait que je suis sur le point de saisir l'alcool que l'on me tends avant que David ne s'interpose clairement mais gentiment.

Hop hop hop! Ce n'est pas fini. Seconde annonce, annonce spéciale! Déjà, rassure-toi, Naoto, Doc' et son collègue du quartier Sud peuvent témoigner que je savais déjà me bousiller la santé avant toi. Mais! Je crois que Doc' peut aussi parler d'une demoiselle qui va se ménager et éviter l'alcool, même pour une si bonne nouvelle. Membres de la famille et de la maisonnée, Naoto est enceinte.

L'ovation qui prend naissance juste après le silence me fait sursauter avant que je ne rougisse davantage. Ces gens ne me connaissent pas mais ils sont capables de se réjouir de mon bonheur. C'est impressionnant. Et David semble prendre son pied en faisant un peu mijoter les hommes présents par cs annonces en distillées par petites doses bien senties.

La tournée du Patron!!! Va y'avoir la tournée du Patron!
 
Ah non, les gars !

Comment ça?!

Elle attend des jumeaux, les gars. C'est pas la tournée, c'est la double tournée!
Tradition du Clan. Les futurs pères paient leur tournée à la naissance de leur enfant. Forcément, selon les revenus, les autres participent. La tournée du Patron, c'est juste pour la pomme du Boss mais c'est toujours mémorable. Mmh, tu sais, je crois que nous avons perdu pas mal d'étiquette, de mon côté. 

Je rigole un peu en souriant à David. Payer une double tournée au clan, voilà qui promettait d'être mémorable, en effet. Pour un peu, j'aurais hâte d'y être, mais cela me laissait encore quelques mois devant moi pour voir venir. Et me remettre de cette journée. .

D'ailleurs il n'y a pas eu de tournée pour Steven! Faut réparer ça.

Le pauvre, le voici à faire des tours de table, complètement paniqué. Et même si je suis un peu inquiète à son sujet, je finis par sourire en le voyant apparemment se détendre. Oui, toute la maison était à la fête et j'avais je n'avais entendu de rires aussi heureux, de conversations si joyeuses autour de ma personne que sur le coup, je ne trouve rien de mieux à faire que de me rasseoir.

Est-ce la fatigue, l'accumulation des dernières heures, les différentes annonces et réactions essuyées? Je n'en sais trop rien mais soudain, je sens les larmes me monter aux yeux alors que mes doigts se serrent autour de cet anneau ornant ma main tandis que cette dernière passe sur mon ventre. Pourquoi tout est-il si lumineux ici alors que chez moi, il ne demeurait que d'éternelles ténèbres?

Mon sourire est toujours présent malgré tout, alors que je ne sais plus trop où donner de la tête, l'agitation et le bruit commençant à me donner sérieusement le tournis et me coupant l'appétit. Je profite cependant de la présence de Judy proche de moi pour m'adresser à elle sans avoir à crier, les yeux encore bien marqués par l'émotion.

"- Sinon, vous avez quand même réussi à vous installer correctement chez vous, ça y est? Les invités ne vous ont pas trop tout détruit dès la première nuit? "

Oh Naoto! Tout va bien.  

Oui. Ici, tout va bien. Et c'est se qui me fait tellement bizarre. Je possède une famille mais ne peux rien partager avec eux alors que même si celle de David est éclatée, ils restent unis et présents, les uns pour les autres. Je l’envierais presque d'avoir cette chance, si je ne savais pas qu'à partir d'aujourd'hui, je la partageais un peu.

Notre installation s'est bien passée, la soirée était géniale. Il n'y a eu que peu d'incidents, quelques verres cassés et...
On a retrouvé plein d'invités endormis étrangement au matin, mais le Doc' a gagné avec...

Stop. On enterre cette affaire. J'avais dit que j'avais honte de lui, et j'ai honte de Doc'!

J'allais pas laisser passer une telle occasion! Les enfants étaient loin...

TA G...!!

Je mets un peu de temps à remettre tous les éléments à leur place avant que le déclic ne se fasse dans mon esprit. Et sur le coup, j'écarquille les yeux de surprise. Ça, ça sentait le Fox à plein nez. Dommage que depuis quelques heures maintenant je ne fasse plus partie de son service, j'aurais été curieuse de pouvoir en discuter avec lui, voir sa réaction. Je comprends aussi la réaction d'Anthony aussi je n'en rajoute pas et laisse Judy enchaîner.

Bref, ça s'est plutôt bien passé. J'imagine que si vous n'étiez pas là, c'est pour cette bague?Tu me racontes?

"- Eh bien, il n'y a pas grand chose à raconter. J'avais été un peu stressée malgré tout par la réception alors j'étais contente de retrouver un peu de calme et puis, j'avais voulu impressionner quelqu'un alors je m'étais faussement vantée d'être la fiancée de David. Alors ce filou en a profité pour rendre mon mensonge réalité. "

Je deviens limite pivoine en racontant tout ça. Un peu comme une gamine prise en faute. Oui, je m'étais avancée sur ce coup-là même si je ne le regrettais nullement. Encore moins suite à la demande de David. Je viens de nouveau jouer avec l'anneau, remarquant le regard avide et curieux de Judy sur ce dernier. Alors, je le retire un peu, pour lui permettre de l'observer à sa guise.

"- Je n'ai jamais été très bijou, mais celui-là, je le trouve juste parfait. Qu'en pense un oeil plus expérimenté que le mien? "

Je lui laisse le loisir de découvrir l'oeuvre d'art qu'est le bague que m'a forgé son demi-frère. Un jour, je lui rendrais la pareille. Moi aussi, je lui offrirais un bijou qu'il pourra porter fièrement sur lui. Dont l'idée est déjà bien présente même si sa réalisation risquait de se révéler fort compliquée. Mais je trouverais un moyen.

"- Mais le meilleur moment, c'est quand les bébés ont bougés. Si seulement tu avais pu voir sa tête quand lui aussi les as senti, c'était adorable. "

C'est donc pour ça qu'il passait ses nuits au quartier Sud? Pour un artisan de ta trempe, je m'étonne que tu te sois esquinté autant les mains. Mais le résultat est vraiment pas mal. 

Je peux sentir la fierté de David à côté de moi et cela ne fait que nourrir mon sourire. Oui, tu as de quoi pouvoir te pavaner devant les tiens. Tu as réussi un exploit, entre cette bague unique et ces vies qui sont doucement en train de prendre forme dans mon corps. Même moi, j'ai encore du mal à le réaliser. Mais tu es bien le seul à pouvoir rendre tout cela possible et pour cela, je ne t'en remercierais jamais assez. Jamais je n'aurais pu rêver mieux.

Ils bougent?! 

Oh, visiblement, voilà une nouvelle qui surprend un peu tout le monde. J'acquiesce doucement, les bulles toujours présentes dans mon ventre bien que relativement légère. Bon, si ils pouvaient éviter de filer régulièrement la nausée et le tournis, j'apprécierais sans doute encore mieux leur présence mais bon, on ne peut pas tout avoir.

Ils ont trois mois, là. Normal qu'ils bougent. 

Ça fait plus longtemps que ce que j'imaginais...

"- Je ne réalise pas bien encore qu'ils sont si vieux. Au fond, je ne suis pas au courant depuis si longtemps. Même David l'a su avant moi, c'est pour dire. "

Oui, dans un sens, je m'excuse. Auprès de lui, de ne pas avoir compris. Auprès d'eux, pour ne pas avoir noter leur présence plus tôt. Mon regard vient croiser le sien alors que j'ai remis sa bague à mon doigt et que ma main vient chercher la sienne. Oui, je ne suis pas très douée dans ce domaine, mais maintenant, je vais faire d'autant plus d'efforts pour me rattraper, c'est promis.

"- Et puis, j'ai une bonne nouvelle pour vous aussi Doc'. Vous n'aurez plus à me taper sur les doigts pour que je ménage. A partir d'aujourd'hui, je ne travaille plus. "

Je le dis sur un ton léger, gardant mon sourire et cette apparente joie qui est ici très communicative mais au fond, je sais bien que cela me coûte. Au moins parce que je n'ai pas eu l'occasion de prendre cette décision par moi-même mais parce qu'on me l'a imposée de force. Cependant, je fais bonne figure avant de me rasseoir, pour me reposer un peu. j'ai encore les nerfs un peu en pelote malgré tout.

"- Par contre, du coup, comme je ne serais plus aussi occupée qu'avant, je risque de vous embêter davantage. alors je ne suis pas certaine que vous gagniez au change. "

Voilà déjà une bonne chose! Tu verras petite! Un peu de calme, ça va te faire du bien! Et puis, tu as des choses à apprendre et à vivre. Et pour pour bien les vivre, un peu de silence et de tranquillité ne sera pas de trop...
Mais ne t'en fais pas pour moi. Comme disait Stan "Si c'est pour la famille, j'ai toujours le temps." Et comme c'est aussi le boulot, je ne m'occupe pas de gagner, mais je te faire gagner. Du poids d'abord, puis deux gluants.

Eh bien, voilà au moins une personne qui semble réellement heureuse que j'en ai fini avec mon métier. En même temps, en l'écoutant, je crois que je peux comprendre aussi. J'avais du mal à réaliser l'importance du fait de me reposer car je pense que je ne me rendis pas vraiment compte de tout ce que cette grossesse impliquait. On m'avait certes plus que sérieusement forcé la main mais cela restait pour mon bien. Et le leur. Alors je devrais pouvoir m'en remettre. Un jour...

"Si c'est pour la famille, j'ai toujours le temps." Vraiment? Comme je regrette de ne pas avoir connu cet homme de son vivant. Comment aurait-il réagit, lui, en apprenant que son fils allait être père, se marier même avec une personne comme moi? Je ne le saurais jamais. Mais autant je trouve ça dénomination des bébés un peu vilaine, autant c'est l'autre partie de sa phrase qui m'a le plus marqué étonnement.

"- Je vais déjà devoir ressembler à une baleine, ne me gavez pas au point d'en atteindre le poids. Ce ne serait guère aimable de votre part. "

Oui, je tente de prendre tout cela à la légère même si en fait, je suis toujours aussi angoissée. Ils sont deux là-dedans et je ne sais rien de leur état. Juste qu'ils sont bien vivants puisque je les sens bouger mais rien de plus. Vont-ils seulement bien? M'en veulent-ils de ne pas les avoir reconnus plus tôt? Sont-ils heureux, à leur façon, là où ils sont?

"- Sinon, nous avons ouvert les paris avec David pour savoir s'il s'agirait de petits garçons ou de petite filles. Alors, est-ce que certains d'entre vous ont leur idée sur la question? "

En attendant, je me suis remise à picorer un peu dans mon assiette. Ils réclament, je le sens bien, puisque je n'ai aucune sensation de faim alors que pourtant, rien que l'odeur me donne envie de retourner piocher dans mon plat.

On va être tantes! Sam, on va être tantes! Mais j'aimerais ne pas choisir entre avoir des nièces ou des neveux.

Techniquement, ils ne seront pas forcément soit deux filles soient deux garçons. Ils peuvent être une fille et un garçon. 

Un garçon et une fille? Oh non, tout mais pas ça. J'avais vu ce que cela donnait avec moi et Minato alors je croisais vraiment les doigts pour que ce ne soit pas le cas. je crois que je préférerais même 2 filles à choisir. Mais ça, c'était le jeu de la génétique et il s'agissait d'une grande loterie dans laquelle je n'avais pas mon mot à dire. Alors, je ferais avec. De toute façon, ils resteraient mes enfants, quoi qu'il arrive. Ce qui me chagrinait le plus serait qu'il ne connaîtrait sans doute jamais ma famille, vu comment s'était déroulé notre dernier entretien.

Mais est-ce que le mariage est prévu?

La question de Judy me laisse un instant complètement prise au dépourvu. J'avais été demandée en fiançailles mais pour le mariage, je ne savais pas du tout. Je réalisais à nouveau à quel point c'était toujours David qui prévoyait tout pour nous deux. J'avale quelques bouchées supplémentaires, plus pour les deux monstres dansant je ne sais quelle danse dans mon ventre avant de regarder David et de répondre, un peu gênée.

"- Eh bien... Moi, je n'ai rien prévu en tout cas. Après, comme je sais que la spécialité de David de tout prévoir, je lui laisserais sans doute aussi organiser tout ça, même si je l'aiderais de mon mieux. "

Et surtout, Judy et Anthony s'étaient fiancés en premier. Il serait donc logique qu'ils soient également les premiers à se marier, non? Je n'en savais rien, je ne connaissais vraiment absolument rien à tout ceci. Mais l'idée que notre mariage leur paraisse si naturel, si normal me rassure. Oui, j'ai fait le bon choix, je le sais. Aussi, je ne regrette pas les quelques difficultés que tout va engendrer pour moi. je suis forte, je surmonterais tout cela. Pour continuer à le voir sourire. Toujours.

"- Et puis, avant ça, il faudra que je lui trouve un anneau moi aussi. Ou au moins un bijou de fiançailles. Parce que là, ce n'est pas juste que lui m'en ai offert un alors que je n'ai rien pour lui, vous ne trouvez pas?  "

Plus que le cadeau, c'est celle qui l'offre qui m'intéresse. Tout comme je suis plus heureux que tu ais accepté ma demande que la bague que j'ai faite. Mais le mariage est quelque chose que nous verrons ensemble. Déjà, nous nous marierons, c'est sûr. Avant vous, je pense. Je pense que nous n'attendrons pas deux ou trois ans pour vous laisser la priorité.

Ils comptaient attendre encore tant que cela, vraiment? Dans un sens, je les admirais. En même temps, leur monde n'était plus le même que le notre. Avec la menace des factions qui planait au-dessus de nos têtes en plus de celle des Ombres, on ne pouvait pas dire que notre longévité était à compter en centenaire. Quel âge avait le plus vieux Seraph que j'ai rencontré? La trentaine, peut-être 40 ans à tout cassé? Oui, pour nous, la vie avait une mesure bien plus immédiate que pour les autres.

Mais je me demande si nous attendrons la naissance des enfants ou si nous te mettrons une robe de mariée au ventre bien rond. Tu préférerais quoi?

"- Ce que je préférerais? J'ai déjà du mal à assimiler le fait que je sois enceinte de jumeaux depuis trois mois et que je suis officiellement fiancée à l'homme que j'aime alors là, si tu attends une réponse immédiate, je serais incapable de te la donner."

Je rigole un peu, venant chercher ses lèvres à mon tour, me moquant totalement des regards et autres commentaires de Sam et Judy sur le fait que nous étions trop 'mignons'. Je veux seulement profiter de ces instants avec lui, de sa présence et de son soutien.

"- Mais au fond, je me demande s'il ne serait pas plus simple de faire ça avant leur arrivée. Je risquerais de trouver la journée longue mais devoir surveiller 2 bébés en plus un jour comme celui-ci, cela pourrait être de trop. "

Je lui souris gentiment, rigolant doucement tandis que mes joues sont redevenues un peu plus rouges. Oui, maintenant que je t'ai attrapé, je ne compte plus te lâcher. Et comme je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve, étant plus que sure de mes sentiments pour lui, je n'avais aucune raison d'avoir la moindre réserve envers lui. Alors oui, j'étais prêt à plonger, du moment que je le savais présent et à mes côtés.

Ha, ha ! Il va bien falloir t'y faire, Princesse. 
Nous n'avons que peu de temps alors. 

Moins de 6 mois en effet. Sans doute encore moins que cela vu ce que m'avais laissé entendre le Doc' à propos des grossesses multiples. Au pire, ce n'était qu'une cérémonie. Au fond, pour moi, j'étais déjà un peu sa femme quelque part, puisque nous étions déjà bien plus liés par la présence des jumeaux que ne l'étaient de nombreux couples. Alors, mariage ou pas, ça ne changeais pas tant de choses que cela. Juste d'un point de vue officiel et administratif dirons-nous.

Regardez moi ce sourire béat. David, je ne te croyais pas capable de faire pareille risette. 

"- Moi je trouve qu'il lui va très bien. "

Et j'espère qu'il le gardera longtemps. Le voir ainsi heureux est tellement rare, si précieux à mes yeux, que je voudrais que ces moments ne se terminent jamais. Le brouhaha ambiant, bien que plus léger, m’incommode malgré tout. Ce n'est pas de leur faute, ils ont bien raison de s'amuser et de profiter de cette journée. Mais après les événements de ce début de matinée, et les jumeaux qui ont décidés de danser la carmagnole, je commence à me sentir un peu fatiguée.

"- Je vous prie de m'excuser mais je vais vous fausser compagnie quelques temps. En tout cas, le repas était délicieux. Et encore merci à tous. "

Merci oui. De m'avoir accepté ainsi parmi vous sans me poser de questions, de m'avoir prouvé que j'avais une place parmi vous alors même que je suis encore une parfaite inconnue. Merci simplement d'être là pour David. Au moins, ici, je sais qu'il est entre de bonnes mains. Je me lève doucement de table, me faufilant vers la sortie de la grande pièce, saluant les différentes au passage, tachant de retenir comme je peux qui est qui.

Personne ne m'a retenu et j'ai enfin pu retourner dans la chambre où des miaulements chaleureux et intrigués m'ont accueillis. Ah oui, les chats sont là, eux. Mais leur manifestation sont loin d'être aussi bruyantes que le brouhaha qui s'élevait de la salle à manger. Je viens m'asseoir sur le lit, laissant Famas se réhabituer à mon odeur tandis que Cute se promène, visiblement un peu jaloux que j'accorde plus d'attention à son compère qu'à lui. Leurs ronronnements doux et légers m'apaisent, alors qu'un instant, je viens serrer le Bob en peluche avant de le remettre à sa place.

Non, je n'ai pas envie de dormir. J'avais seulement besoin de clame, toute cette agitation étant de trop pour moi. Oui, ils sont ravis, pour lui et pour moi et cela me touche sincèrement mais au fond de moi, je pleure toujours un peu. J'ai gagné une famille mais à quel prix? J'ai l'impression d'y avoir laissé la mienne en échange. Mais est-ce réellement un mal quand j'y repense? Cette simple idée me dégoûte. Ils sont ma famille, je n'ai pas le droit de leur en vouloir. Et pourtant.

Je me suis approchée de la fenêtre pour apercevoir David et Steven. Se battant. Ou plutôt, s’entraînant? Cela ressemblerait plus à un règlement de compte vu d'ici, voir même une tentative de putsch de la part du petit garçon. Et lui, que deviendra t'il? Répétera t'il nos erreurs? Est-ce cela tout l'avenir que j'ai offrir aux jumeaux? Je me détourne de ce spectacle pour me laisser tomber doucement sur le lit. Pourquoi? Pourquoi tout est-il toujours aussi compliqué?

Allongée en position fœtale, la tête tournée du côté de la fenêtre et mes doigts jouant dans le pelage de Famas tandis que Cute me tourne autour avec curiosité, je peux entendre ses pas grimper l'escalier avant qu'il ne s'approche. L'eau qui coule dans la salle de bain à côté me berce un peu et je me retourne doucement, pour finir par capter l'éclat de son regard dans l'embrasure de la porte restée entrouverte.

"- Tu m'espionnes, maintenant? J'ai promis d'être sage pourtant. Et tu vois, je tiens toujours ma parole."

Oui, j'essaie de prendre cela à la légère, c'est ce qui m'aidera le plus de toute façon. Je lui souris gentiment alors que Cute, qui avait décidé d'escalader mes jambes ne dégringole depuis mes hanches jusque sur le couvre-lit, me faisant doucement rigoler. Il est peut-être mignon mais pour un chat, il n’est pas très doué celui-là. Au fond, il me rappelle quelqu'un, que je connais fort bien.

"- C'est drôle, Cute me fait penser à moi. Têtu, un peu trop téméraire et qui a beau tomber, se relève toujours. Même si ça doit lui prendre du temps. Je ne sais pas d'où il vient, ce petit bonhomme, mais il a de la chance de t'avoir trouvé."

 Pardon, je ne voulais pas te réveiller. Même si Famas et Cute semblent déjà y travailler. 

En effet, mais de toute façon, je n'avais pas sommeil. Pas encore du moins. Je crois qu'au fond, en cet instant, j'étais juste trop lasse pour vraiment vouloir dormir. Un des rares avantages de ma Nature Seraph était qu'en me privant de sommeil, il me libérait aussi des tous les cauchemars qui hantaient mes nuits. Et je savais que mes prochains repos n'en seraient pas exempts. Un dragon rôdait trop près de moi pour me laisser tranquille pour le moment.

C'est ce qu'ont fait lui et Famas : ils sont venus devant chez moi, m'ont trouvé et sont restés. Sans vraiment me demander mon avis. Ils n'avaient de toute façon plus nulle part où aller. Mais je m'y suis attaché. Même si ce ne sont pas des animaux agréables, ils sont d'autant moins regardant sur leur maître.

"- Les animaux ont l'avantage de ne pas avoir les mêmes critères de sélections que les humains. Eux, ils sentent la véritable bonté, la gentillesse à l'état pure et la douce sécurité que ceux qui les apprécient peuvent leur offrir. Finalement, c'est nous qui sommes aveugles et eux qui ont raison sur toute la ligne. "

Cute est malgré tout en meilleur état que Famas, cela dit, preuve que sa témérité le lui rend mieux que la passivité de Famas. Lui, comme il est aveugle, il n'y a que son maître qui le fait bouger. 

Pourquoi ais-je la sensation que comme je l'ai fait, il y a une sorte de comparaison entre lui et Famas? Non, je ne veux pas qu'il pense ainsi. Il a déjà réalisé tant de choses, il ne va cesser de continuer. C'est un homme bien, je le sais, j'en suis plus que convaincue. Mais personne ne peut l'approcher assez pour s'en rendre compte. Lui aussi s'est créé une image qu'il défend bec et ongle. Finalement, nos ressemblances sont encore plus profondes que je ne le croyais.

Cute dans mes bras, je viens me rapproche, venant simplement m'appuyer tout contre lui avant de laisser déposer ma tête dans le creux de son cou. Le petit chat blanc déposé aux côtés de Famas, il semble essayé de jouer avec son camarade, comme pour le sortir de sa torpeur. Doucement, réalisant bien que Famas n'est pas tout à fait comme lui.Mais il ne le laisse pas pour autant.

"- Etre aveugle n'est pas insurmontable. Et maintenant qu'il a Cute, cela va peut-être aussi le motiver un peu, l’entraîner différemment. Si Arsen s'y met, qui sait? Peut-être que tu finira par lui découvrir des capacités insoupçonnées.
Et puis, il ne faut jamais se fier aux apparences, tu le sais mieux que quiconque."

Je lui souris doucement, repensant à ce que j'ai vu depuis la fenêtre. L'échange musclé entre les deux frère. Je ne sais rien de leur relation mais vu comment a commencé, je doute qu'ils aient réussis à tisser de francs liens de fraternité. J'espère seulement que Steven ne tentera rien d'idiot, pas contre nous. Je ne voudrais pas que les choses dégénèrent de nouveau.

"- Alors?... Tes impressions sur tes beaux-parents?...
Je t'avais prévenus. Chez moi, c'est.... assez spécial comme ambiance... "

Oui, je ne veux plus penser à tout cela mais malgré tout, ils restent ma famille, une partie de mon mode et je'y reste attachée. Au travers de la douleur et ds épreuves, ce sont eux qui m'ont forgés pour que je devienne celle que je suis aujourd'hui et sans toutes ses difficultés rencontrés, au bout, je n'aurais jamais eu l'occasion de le rencontrer. Alors, je leur dois au moins ça.

 Pour l'heure, ses seules capacités sont de manger beaucoup trop et de supporter l'hyperactivité de son nouveau copain. Heureusement que je n'ai plus besoin de dormir. 

Je profite de la chaleur des bras de David venu se lover contre moi. Je me rapproche encore de lui, pour me sentir au plus près de lui. Je sens bien qu'il y a quelque chose qui ne va pas chez lui mais je ne veux pas en rajouter outre mesure. Je laisse les deux félins s'amuser à leurs façons, Cute cherchant à attraper les doigts de David tandis que Famas vient se blottir contre lui avant de s'endormir en ronronnant. Je ferais bien pareil, si je le pouvais.

Spécial? Ton père est un tyran partial, ta mère fait très bourreau et ton frère est un sale gosse, buté, gâté et insupportable. Je m'étonne que tu aies si bien fini. Qu'ils le vivent bien, grand bien leur fasse, mais qu'ils se soient acharnés ainsi sur toi...
Enfin, je ne peux pas en dire mieux de la mienne : elle s’entre déchire et s'entre dévore. Je vois pourquoi notre animal est le requin. 

Oui, il était vrai que son tableau était plutôt réaliste, d'autant plus pour ma famille que pour la sienne. Pourtant, je n'arrivais toujours pas à les voir comme il les décrivait. Ils restaient ma famille, malgré tout ce qu'ils m'avaient fait subir. Et ce constat m'affligeait autant que de remarquer la réalité de la ressemblance de nos existences.

"- Au moins, nous savons ce que nous ne voulons pas reproduire. Faute d'avoir un modèle à suivre, nous en aurons deux à éviter. Ce sera toujours ça de prit. Et mine de rien, je trouve ta famille bien accueillante que la mienne. "

Je reste blotti contre lui, hésitant à lui demander comment cela se passait avec son demi-frère mais je finis par m'abstenir. Il avait eu aussi de colère à gérer, lui aussi avait mal vécu cette journée mine de rien alors je ne voulais pas en rajouter sans raison.

"- J'espère que le Doc' sera un peu sympa demain. J'avoue que j'ai eu ma dose de remontrances pour le moment. Je risque de me montrer désagréable sinon."

 Ils leur restent ça. J'avoue que je cherche plutôt quoi reproduire. Je ne tiens pas à devenir un instructeur de combat pour nos enfants. Règle numéro un, ne pas mettre une arme à feu ou un couteau dans leur main quand ils seront capable de mettre un pied devant l'autre. La liste des règle va être longue.  

Je suis assez étonnée de voir le titre du livre qu'il me tend. Il s'agit d'un ouvrage sur l'art de devenir parents. Un livre rempli de conseils, d'avis et de divers autres petites astuces sur comment se comporter, quoi faire, quoi dire et ne surtout pas faire. En tout cas, son idée de liste me fait bien rire, même si je suis plutôt d'accord avec lui. Pas d'armes à feu, de leçons de combats, de couteau ni rien d ce genre. jamais entre leurs mains?

"- Ce n'est pas une liste que nous allons avoir, c'est au moins un dictionnaire qu'il nous faudra. "

Il n'a rien à te reprocher. Tu te reposes et tu suis ses conseils, non? 

"- J'essaye. Mais comme visiblement je ne fais jamais ce qu'il faut comme il faut, je m'attend à être de nouveau remise à ma place. On ne peut pas dire que j'ai évité le stress avec les derniers événements. "

Je feuillette un peu le livre qu'il m'a passé. Finalement, encore une fois, c'est lui qui a eu la meilleure idée. Je n'ai même pas eu la présence d'esprit de me renseigner ne serait-ce qu'un peu sur l'arrivée des bébés et tout ce que cela va changer. Il va vraiment falloir que je mette à jour mes priorités également. Premièrement, démissionner officiellement et ensuite... ne plus m'occuper que de David, des bébés et de moi.

"- Et avec Steven? Comment cela se passe de ton côté? Visiblement, il n'avait pas l'air spécialement heureux tout à l'heure. Ou plutôt, déçu."

 Tu fais ce qu'il faut, Naoto. Je le vois.   

Mais ce n'est pas assez. Toute ma vie, j'ai fait au mieux et même plus. Cependant le résultat reste le même. je garde cette réflexion pour moi, profitant de ses lèvres sur mes cheveux alors que je me blottis un peu plus contre lui. Le Doc' n'est pas méchant mais je sais que je ne suis pas facile à vivre non plus. Et il n'y a pas de manuel pour m'expliquer comment passer de l'état de 'fille refoulée' à 'mère' en 10 leçons.Malgré tout, ses paroles m'encouragent.

Il... et bien, il ressemble à mon père physiquement, mais son caractère est bien celui de sa mère. Et... Il me déteste autant qu'elle. Il a raison, Seigneur, il serait fou s'il ne me détestait pas... Seulement... comment dire? Je crois que je ne tolère plus cette colère. Sa mère me la fait subir pendant six ans, elle a même influencé mon enfance. Aujourd'hui, alors qu'elle n'est plus, j'ai l'impression que sa haine me poursuit encore. Le problème, c'est que si je la fait taire, c'est à mon frère que je m'en prends. Demi-frère. 

"- Steven est encore un enfant. Et il est passé par des choses difficiles récemment. Ça n'excuse rien, je sais, tu as vécu bien pire mais... A son échelle, son monde aussi a été anéanti. Il faut peut-être lui laissé un peu de temps. "

Je me permets d'avancer cela sans savoir réellement si c'est vraiment une solution. ma famille est peut-être tyrannique, digne de formidable bourreau et passée maître dans l'art de la domination psychologique des gens, chez David, on laisse parler les coups. Les bleus et le reste, je les ai vus sur son corps, et je peux encore les deviner même une fois disparus. Nos douleurs n'ont pas la même origine mais restent semblables, ce qui nous rapproche encore plus.

"- Est-ce que tu voudrais... que j'aille lui parler? Les mots, c’est un domaine que je connais bien. Et puis, je doute qu'il m'apprécie également. J'étais présente ce jour-là également, il doit forcément s'en souvenir."

Je sais très bien que je ne pourrais pas régler les problèmes profonds qu'il y a entre eux mais peut-être qu'un autre point de vue, permettrait à Steven de relativiser les choses? A David par la suite de se rapprocher de lui? Il a déjà perdu tant de membres de sa famille, je ne voudrais qu'un autre joue de nouveau contre lui.

 Lui laisser du temps? Comment? Il ne connait rien des Sharks, ne sait pas se battre et ignore les moindres subtilités de la mafia de Palema, ses groupes et ses règles, inviolables. Sans le voir comme un futur chef, étant mon frère, il risque sa vie. Il ne sait pas la défendre et refuse ma protection. Il se fera forcément prendre pour cible, un jour et ne peut même pas se mettre en garde correctement.
Mais il me voit comme un ennemi et ne comprend pas que comme ça, il se met une balle dans le pied. Tant qu'il s'oppose à moi, je me dois de le reprendre, encore et toujours, et ne pas montrer de faille. Je ne serai que plus cruel face à sa haine. 

Il tient à Steven. Malgré la rudesse dont il peut faire preuve, c'est une évidence. Il ne veut pas le voir finir comme lui, vivre toutes les horreurs qu'il a vécu mais pour le moment, ils sont comme des miroirs qui se renvoient mutuellement les mêmes images. De la haine, de la rancune, de la douleur et de l'incompréhension. Ils ne sont pas capable de se parler car au fond, ils se ressemblent tellement, ils ont perdus un père, leur mère leur a été ôtée de force et ils ils ont comme famille une mafia plus que de vrais frères ou sœurs.

Je ne voudrais pas qu'il ... Tu étais là, mais tu es ma fiancée. Je ne pense pas qu'il t'écoutera. Peut-être dans quelques années...
Non. 

"- Je peux aller le voir sans parler de toi. Après tout, que tu le veuilles ou non, qu'il le veuille et que je veuille ou non, le résultat sera le même. Nous serons de la même famille alors autant que l'on se connaisse un minimum. "

Je comprend ses réticences mais nous ne pourrons pas passer nos vies à nous éviter. Il ne me connait pas vraiment, mais je moi non plus. Et puis, aujourd'hui, que puis-je bien craindre de cet enfant? Sa colère, ses hargne, ses reproches? Surement pas ses coups, j'ai vu ce qu'il vaut et David ne l’entraîne pas depuis assez longtemps pour qu'il puisse vraiment se montrer dangereux. Pas aujourd'hui en tout cas.

"- Dans quelques années, il sera justement sans doute trop tard. Pense aux bébés. Aujourd'hui, je ne risque rien de sa part. Mais quand tu l'auras entraîné, ce ne sera plus le cas. S'il y a un abcès à crever, le plus tôt sera le mieux. Et au pire, s'il ne veut pas me voir, je comprendrais. Mais au moins, j'aurais essayé.
Je ne voudrais pas que sa colère envers toi se répercute sur nos enfants, je ne le permettrais pas. S'il venait à tenter quoi que ce soit contre eux....  "

Je ne savais pas ce dont je serais capable. Je me moquais qu'il puisse s'en prendre à moi, j'étais bien assez grande pour me défendre toute seule. Mais j'allais me retrouver bientôt à élever deux bébés. Mes enfants, ceux de David. Et il est hors de question que quiconque puisse les mettre en péril. Pas alors qu'enfin, je faisais tout mon possible pour le préserver au mieux. Et même si je me suis promise de rester calme, je peine à ne pas trembler en imaginant quelqu'un leur faire du mal.

 Je le tuerai avant ! 

Oui, je n'en doute pas. Mais je t'en prie, ne dis pas des choses pareilles. Il fait partie de ta famille, il est du même sang que toi. Ce regard que tu as eu à l'aquarium à mon égard, en voulant me tuer, je ne veux plus le revoir briller dans tes yeux. Tu vaux tellement mieux que ça. Je te connais, je sais ce qui se cache réellement au fond de toi et ce n'est pas ce tueur froid et sans remords que tu laisses apparaître le plus souvent

De toute façon, je ne m'opposerai pas à tes choix. Mais... 

"- Je serais prudente, rassure-toi. Et puis, rien ne t'empêche de rester tout près, si tu crains pour nous. Mais si nous pouvions nous entendre, au moins nous tolérer, ce ne serait pas mieux que de se détester? "

J'ai perdu ma famille tout comme tu as perdu la tienne. Alors, même s'il ne s'agit que des restes brisés que nous pouvons maladroitement recoller, j'aimerais tenter ma chance malgré tout. Je ne veux plus avoir à ne faire que me battre, envers et contre tout.

"- Après, je n'irais pas le voir aujourd'hui. Je crois que j'ai eu plus que ma dose et il y a eu assez d'émotions fortes pour tout le monde. Peut-être demain, après le rendez-vous avec le Doc'. Ou une prochaine fois. Mais j'aimerais le rencontrer autrement que comme le détective qui a amené à la mort de sa mère...  "

Oui, c'était important pour moi. Qui sait, peut-être qu'il ne me reconnaîtrait pas. Qu'il ne ferait pas le lien entre ses deux apparences qui étaient pourtant la même personne. Je quitte légèrement les bras de David pour venir m'allonger sur le lit, aux côtés de Famas. Je baille légèrement tandis que je souris à David malgré tout. Je sais que ma demande ne lui plait pas mais il doit bien comprendre que je ne le fait pas contre lui. Mes doigts viennent caresser Cute qui ronronne avant que je n'ajoute.

"- Un frère, c'est important. Toujours. Même si on l'apprécie pas... "

 Tu sais, je l'apprécie. Ça ne fait qu'un mois que je me connais un frère, mais j'ai souvent voulu en avoir un. Steven est plus jeune que l'image que je m'étais faite, et notre rencontre est loin de ce que j'avais imaginé, mais j'ai envie de le voir bien grandir et être un homme accompli. Mais j'ai un devoir envers lui. Je ne suis pas que son frère.  

"- Mais tout ça, ce n’est pas à moi qu'il faut le dire. C'est à Steven.... "

Mine de rien, je suis rassurée par ses paroles. Oui, les choses ne s'étaient pas passées pour le mieux mais il aimait ce frère que la vie venait de lui révéler. C'était une bonne chose, pour tous les deux. Même si Steven n'était pas encore capable de s'en rendre compte ni même de le comprendre. L'amour peut prendre de nombreuses formes, surtout pour ceux qui, comme nous, on grandit sans réellement le connaitre, en le cherchant et le trouvant parfois, mais toujours de la mauvaise manière.

Enfin, je présume que rien ne te ferait changer d'avis. 'Ce que femme veut, Dieu le veut'. Je dois aller travailler en bas. Je te laisse dormir un peu.

"- Il paraîtrait que je suis têtue, en effet. Travaille bien mais ne te surmène pas non plus. Sinon, je serais obligée de venir te taper sur les doigts, je te préviens."

Je lui souris doucement avant de lui offrir ce baiser qu'il me réclame, avec beaucoup de douceur. Je fais semblant de le retenir un instant, avant de le laisser partir. Mais avant de m'allonger pour me laisser dormir, je reprend le paquet que m'a remis Sebastian, de la part de Mère, en quittant la demeure. Je l'observe un moment, le serrant un pue contre moi, essayant d'imaginer ce qu'il peut contenir. Mais je ne trouve pas le courage de l'ouvrir. Alors, je finis par m'endormir, les deux chats contre moi et le paquet sous la main.

[ => Fin du rp pour moi ]