Confession au clair de Lune.

A

ller, encore une heure et c'est terminé. Je pose le téléphone sur le combiné, étirant un peu mes bras avant de me reposer sur la chaise. Bon… vu l'heure, je doute qu'il y ai des clients.

《 Courage… 》

C'est bientôt fini. Et d'ailleurs, le temps qu'il reste passe plutôt rapidement. J'aide le patron à fermer la boutique, prends mes affaires et sort du magasin pour rentrer mais une fois dehors, je remarque que j'ai reçu un message.

《 C'est une blague ? 》

Sérieusement, je ne le reçois que maintenant ?!

《 Saleté de portable…! 》

Je cours à travers la rue, pestant contre moi-même jusqu'à ce que j'arrive enfin près de chez moi tout en me demandant s'il est encore là mais ce que j'aperçois me rassure et me fait culpabiliser en même temps. Il a dû patienter un bon bout de temps…

- Excuses-moi… fis-je essoufflé en arrivant devant lui, je n'ai... reçu ton message qu'en sortant du taf...

Je reste un moment à reprendre ma respiration avant de me redresser pour prendre les clefs de la maison, invitant Bibi à entrer par la même occasion. Ma tante n'est pas là donc je suppose qu'elle est encore de garde cette nuit mais bon… Je me demande bien ce qu'il se passe pour qu'il vienne à cette heure.

Confession au clair de Lune.

U

ne fois sur le point de rentrer, le Seraph me dit qu'il vient d'arriver. J'acquiesce donc, un peu rassuré en me disant qu'il n'a pas trop attendu finalement.

《 C'est déjà ça. 》

Je referme la porte derrière nous, allume la lumière, retire mes bottes et commence à m'avancer tout en retirant ma veste et mon sac. J'allais d'ailleurs lui proposer quelque chose avant de poser mes affaires dans le salon mais ce dernier m'annonce qu'il veut me parler. Je m'arrête donc et me retourne, posant vite fait ce que je porte sur la rampe d'escalier.

- Ça ne va pas…? Demandé-je intrigué et soucieux à la fois.

Il a l'air plus… atterré que d'habitude. Ça me préoccupe un peu et je décide de m'approcher pour l'écouter.

Confession au clair de Lune.

J

e ne sais pas quoi dire, le voir ainsi me rappelle la dernière fois lorsqu'il était en larmes. Je n'avais rien pu faire, je me suis contenté d'attendre, d'attendre et de le réconforter. J'ai bien compris qu'il a des problèmes et je n'en ai pas demandé plus mais ce qu'il me dit là, m'inquiète encore plus. Il me dit que sa vie est un échec, qu'il a fait pleins de mauvais choix. J'ignore de quoi il s'agit et il y a quelques temps je ne savais pas si je serais capable de l'entendre mais…

《 Je veux savoir. 》

Je reste silencieux mais… ça me tue de le voir sourire à chaques fois sans vraiment comprendre ce qu'il a vécu. Même si sa vérité est loin d'être rose, je veux savoir pour ne serait-ce que l'aider à se décharger un peu de tout ça. Seulement, cette fois-ci, il semble vouloir s'éloigner à nouveau. Il veut tout laisser tomber et partir comme ça ?  Sans explication ? Cette pensée m'effraie et je décide de l’attraper à mon tour. Restant silencieux, le regard toujours au sol.
Oui, il y a beaucoup de choses que j'ignore sur lui mais ça ne peut pas continuer ainsi. Il y a tant de choses que je veux lui demander mais... je ne peux pas lui demander tout et n'importe quoi n'importe comment. Et... pour l’amener à parler… peut être que je devrais en parler en premier…? Je veux en savoir plus sur lui… Alors… Je dois lui dire ce que j'en pense directement et honnêtement cette fois-ci.

- ...Bibi. Je… fis-je nerveusement, légèrement tremblant, Je sais bien que malgré tout, je ne sais pas grand-chose de toi et de ce que tu as vécu… Quand je m'en suis rendu compte la première fois, ça m'a un peu surpris… Je me demandais pourquoi tu gardais autant de choses aussi douloureuses pour toi… et je me suis d'abord dit que tu avais tes raisons alors… J'ai décidé de te faire confiance et d'attendre. D'attendre jusqu'à ce que tu veuilles m'en parler mais… Si tu pars comme ça… Ça n'arrivera jamais et…

Les mots sortent douloureusement, je ne veux pas qu'il parte, pas comme ça. Même si ce qu'il me dit est douloureux...

- Même si tu n'es pas celui que j'imagine : je veux savoir, tout savoir. Ce qu'il t'es arrivé avant, pourquoi tu es comme ça… même maintenant. Si tu ne veux pas alors… avoué-je en détournant les yeux un instant, Non, il faut que tu me le dise… Je veux que tu me le dise. Terminé-je en le regardant droit dans les yeux.

S'il ne veut toujours pas parler et s'en va après ça…
S'il veut vraiment tout laisser tomber… Alors je l’écouterais et je laisserais tomber aussi même si au fond… Je ne pourrais pas supporter ce choix.

Confession au clair de Lune.

L

a révélation est brutale, je reste muet en l'entendant tout balancer, surpris sur le moment mais maintenant je comprends… Comment pouvait-il expliquer ce genre de choses…? Comment d'autres personnes auraient réagit...? Je m'inquiétais pour lui… même si au fond. Ce que je ne ressens n'est autre qu’un immense sentiment impossible à décrire et qui prend possession de moi. Ça ne peut pas être le choc d'avoir appris tout ça à propos de Bibi. J'ignore comment décrire ça avec des mots… Je ne sais pas… Avec tout ça… Je ne sais pas ce que je pourrais dire.
Le simple fait de le voir sur le point de partir avec ce visage complètement bouleversé alors qu'il pense qu'il me dégoûte…

《 Non… 》

Je le vois souffrir à cause de tout ça… Mais au fond… Est-ce vraiment de sa faute ? Non... Ça a commencé à cause d'un voeu. De ces stupides chats. Et de cette guerre absurde. Il n'a fait que suivre sans se poser de questions. Il ne peut pas changer ce qu’il a fait, c'est vrai mais… Je ne veux pas le perdre. C'est peut être égoïste… ou quoi que ce soit d'autre mais je ne peux pas rester là sans rien faire à attendre qu'il parte : ça ne fera qu’accentuer sa souffrance et sa solitude. Si je le laisse seul… Ça n'arrangera rien du tout si bien que je décide de rattraper le Seraph et de m’accrocher fermement à lui.

- C'est faux. Dis-je en fermant les yeux sans le lâcher.

Je ne veux pas qu'il parte. Ce qu'il m'a dit est dur à encaisser mais je… jamais je ne dirais ça. Je souffle un instant avant de rouvrir les yeux mais ne cesse pas de l'étreindre.

- Peu importe à quel point tu essaiera d'oublier ou de fuir, tu ne peux pas changer ce qui est arrivé… Ce que tu as fait. Fis-je sérieusement, tu as blessé un tas de gens… et ça tu ne peux pas l'effacer.

Il en a conscience, je le sais… Sinon il n'en souffrirait pas autant.

- Tu n'es pas le premier à l'avoir fait, à avoir commis ce genre de choses pour cette foutu guerre et… Tu ne serais pas aussi mal si ça ne te faisais rien. Fuir ne changera rien, ça n'apportera rien. Continué-je en me redressant légèrement, tenant toujours aussi fermement ses épaules pour lui faire face. Mais est-ce que ça te va…? Ça te va vraiment de t'enfuir comme ça ? Ça peut être une façon d’éviter le regard des autres mais tu feras pareil avec Elizabeth ? Avec ta soeur ? Tu penses vraiment que je serais mieux sans toi ? Parce que ça ne sera pas le cas, ça ne sera plus la même chose pour chacuns. Avoué-je les larmes aux yeux.

Ça me refait penser à mon frère… Lui aussi est parti et je n'ai rien pu faire.

- Ça sera forcément douloureux. Et même si tu penses que c'est mieux ainsi, ce sera blessant. On ne peut pas soigner des cicatrices aussi profondes, tu le sais très bien. Personne ne peut s'en remettre. Mais s'il y a une chose que j'ai retenu… C'est que peu importe ce que tu as fait ou par quoi tu es accablé, tu es resté le même. Et c'est ce que je n'arrêterais pas de dire : je te le dirais à chaques fois s'il faut que je le répète. C'est pourquoi… Je ne supporterais pas de te voir partir. Tu ne me dégoûtes pas. Terminé-je en laissant couler mes larmes, complètement attristé.

Confession au clair de Lune.

J

e le regarde, les larmes coulant toujours, même si c'est égoïste, je ne veux pas qu'il parte. Un sentiment lourd vient m'écraser le coeur lorsque je le vois s'effondrer au sol alors que je me baisse pour venir l'enlacer à nouveau.

- Tu n'es pas un raté, tu es toi. Et je t'accepte comme tu es. Fis-je en essuyant un peu mes yeux sans pour autant le lâcher.

Ce n'est pas lui qui a provoqué tout ça, ce n'est pas lui qui a rendu ce monde aussi absurde. Alors je crois en lui… je… veux qu'il reste ici.

- Personne n'est parfait… Avoué-je en saisissant son visage pour le regarder, Et je peux parfaitement comprendre que tu te dégoûtes… Mais tu restes le même à mes yeux.

- Tu n'as pas à changer quoi que ce soit. Continué-je en l’étreignant à nouveau, Rien ne pourra changer. Ce qui est fait est fait. Et tu seras obligé de vivre avec… Mais je ne veux pas que tu partes…

Il peut me traiter d'égoïste s'il veut mais je ne peux pas le laisser… Je ne veux… pas… qu'il m'abandonne…

《 J'ai assez perdu de personnes comme ça. 》

Confession au clair de Lune.

I

l continue de s'accabler lui-même malgré tout. Est-ce que je suis si… inutile…? Je ne peux rien faire pour l'aider…? Non je ne pense pas qu'il ne ressente rien en ayant fait tout ça.

- Si tu n'éprouvais aucuns remords, tu ne serais pas ici et tu n'aurais pas été aussi bouleversé la dernière fois. Répondé-je en continuant de l'enlacer, passant ma main dans ses cheveux.

Ce qu’il ressent... c'est comme avec sa drogue. C'est éphémère… et ça finira par le détruire… Ce n'est pas une bonne chose d'agir comme ça et ça l'est encore moins pour lui.

- Et… tu penses vraiment que je t'empêcherais de partir si je pensais que tu étais une mauvaise personne ?

Il y a des cons et des gens biens dans ce monde, il faut de tout. Mais je reste persuadé que chacuns n'est jamais totalement noir ou blanc.

Confession au clair de Lune.

M

algré tout ce qu'il me dit, je suis sûr de ce que j'avance. Bien sûr, Bibi est loin d'être innocent… C'est un fait immuable… Mais il n'est pas quelqu'un de mauvais… Bibi ne s'en rend pas compte et je ne sais pas si je réussirais à lui faire voir.

- Moi non plus… avoué-je sans pour autant arrêter de l'enlacer après avoir entendu sa dernière tirade.

Je ne veux pas le perdre, pas lui, pas sans avoir pu faire quelque chose. Je ne m'en remettrais pas. Je le sais...

Confession au clair de Lune.

J

e ne saurais dire combien de temps on est resté comme ça mais ce que me dit Bibi ne fait que renforcer ma volonté de continuer à l'étreindre.

- Peut être bien… Mais ce ne serait pas toi. Fis-je toujours sans le relâcher.

《 Et je ne veux personne d'autre. 》

Même si c'est égoïste, même si c'est stupide… Je ne compte pas le lâcher. C'est hors de question. Et lorsque le Seraph s'allonge au sol, sa demande fait s'accélérer les pulsations dans ma poitrine. Je reste un moment silencieux, pinçant mes lèvres avant de saisir doucement son visage.

- ...Je t'aime. Avoué-je en le regardant droit dans les yeux et les joues rouges non pas par honte cette fois mais à cause des sentiments que je ressens à son égard et qui réchauffent mon visage.

S’il faut lui redire, je le ferais autant de fois qu'il le faudra. Peu importe ce qu'il dira ou ce qu'il pensera, je sais au moins ça. Je l'aime et je ne veux pas le quitter… Je veux rester avec lui.

Confession au clair de Lune.

J

’appose ma tête contre lui au moment où il m’étreint à son tour alors que je passe mes bras autour de lui pour me blottir un peu plus. Près de lui, la chaleur ne diminue pas, bien au contraire mais ça m'apaise en quelques sortes tandis que je l’écoute parler.

《 Il n'est pas obligé de se battre… si…? 》

Apparemment il est aussi tiraillé entre deux choix. Sa faction ou moi. Et je me sens mal d'une certaine façon : je sais que c'est de ma faute… Aussi, il semblerait qu'il ait été là pendant ce massacre… Ce massacre ordonné par les Nephils… Et ça ne fait que renforcer l'idée que ce n'était pas la bonne solution. Mais je ne le lâcherais pas. Je ne veux pas l'abandonner, surtout pas après avoir entendu tout ça.

- Tu sais…

Fis-je doucement après un long moment de silence.

- Depuis le jour où j'ai signé mon contrat… non… même avant… je n'ai fait que boulettes sur boulettes. Je ne suis même pas sûr d'avoir réussi quelque chose de bien un jour sauf t'avoir rencontré toi… Alors… Merci à toi aussi.

Confession au clair de Lune.

S

’il savait également à quel point je tiens à lui… Mais je ne dis rien alors que je replace correctement ma tête sur lui : mouvement lent et explicitement approbateur à ses mots avant que mon partenaire ne décide de se relever, ce que je fais à mon tour sans interrompre l'étreinte et ce, le plus longtemps possible. Je ne vois pas ce que je pourrais dire… Tant de choses ont été dites ce soir… Mais je sais enfin tout ce qui le tracassait. Je peux enfin comprendre la situation et tenter de l'aider.

- T’es sûr ?

Au moment où Bibi me dit qu'il doit rentrer, je suis un peu surpris mais je sens mon inquiétude retomber légèrement puisqu'il a l'air de se sentir bien mieux par rapport à tout à l'heure. Aussi, je n'insiste pas, il doit avoir quelque chose d'important à faire donc je fini par acquiescer à sa dernière phrase.

- Fais attention à toi.

Terminé-je en le regardant. Il va revenir donc tout va bien : vu son attitude, je lui fais confiance.