La venue de l’automne avait donné aux feuilles des arbres des teintes ravissantes, dont les couleurs changeant d’une feuille à l'autre s’entremêlaient en une sorte d’harmonie que Gamaliel avait essayé de coucher sur une toile - sans succès, il faut bien l’avouer. Mais maintenant que la saison touchait à sa fin, la plupart de ces feuilles étaient tombées au sol et l’atmosphère dans laquelle était plongée la ville se transformait lentement à l’approche de l’hiver. Et avec la saison froide allait venir la période des examens au sein de la faculté. Pour Gamaliel, ces examens allaient sans doute être les derniers de sa scolarité : après ceux-ci il allait devoir se consacrer à la rédaction d’un mémoire de fin d’études.

 Naturellement, il avait passé les derniers jours à étudier, ce qui n’était pas forcément trop bon pour sa santé, et avait besoin de sortir un peu, pour se distraire et souffler avant les examens. À cette fin, il avait proposé une sortie à l’un de ses amis de l’université. Celui-ci faisait des études d’histoire, comme il l’avait fait auparavant avant de se décider de la spécialité de sa maîtrise, et il avait eu l’occasion de sympathiser avec lui plusieurs fois tant à travers l’association qui regroupait les élèves de la faculté appréciant que par le système de tutorat qui avait été mis en place par l’université.

 Gamaliel lui avait proposé de se retrouver au Musée Bakkerfield, consacré à l’histoire ancienne, pour le visiter et en profiter pour discuter. Sa dernière visite de celui-ci remontait à quelques années auparavant et il était intéressé tant par le fait de redécouvrir tout ce qu’il avait pu oublier à propos des salles du musée que par le fait de voir l’exposition temporaire qu’ils tenaient actuellement et allait bientôt se terminer. C’est donc un peu dans la foulée qu’il avait contacté son ami, seulement pour se demander après coup s’il n’avait pas choisi le mauvais moment pour lui proposer de visiter un musée d’histoire.

 Ayant reçu une réponse positive et qui lui semblait de surcroît avoir été enjouée, il s’était donc rendu devant le musée en cette matinée - il y avait généralement moins de visiteurs le matin, donc il était plus agréable de le visiter à ce moment là. Il avait prévu d’arriver en avance mais était en retard d'une ou deux minutes vu que son bus n’avait, pour une fois, pas été très ponctuel. S’il avait su, il serait sans doute venu à pieds mais il ne pouvait plus rien y faire désormais donc il se contenta de remettre son écharpe en sortant du bus et de chercher son camarade qui ne devait sans doute pas être loin - ou alors plus pour très longtemps.

 Sa quête ne fut pas longue puisqu’il l’aperçu dès qu’il s’approcha un peu plus de l’entrée du musée. Se rapprochant de lui tout en se disant qu’il n’appréciait vraiment pas le genre de sensation qu’accompagnait le fait d’être en retard, mais qu’au final il s’agissait là d’une chose bien courante même si elle ne lui arrivait que rarement, il l’interpella doucement, en profitant pour s’excuser.

« - Hey Bibi, ça va ? Je ne t’ai pas trop fais attendre, j’espère ? »

 Tendant en même temps sa main à son ami, il était près à commencer la visite du musée, n’ayant pas oublié la carte qui attestait d’un abonnement d’un an pour les lieux culturels de Palema et qu’il reprenait tous les ans, qu’il ait ou non effectué suffisamment de visites dans l’année pour la rentabiliser.

Les études commençaient doucement à me prendre la tête ces temps-ci. L'année avait pourtant commencé il y a peu, mais déjà la tension des premiers examen ce faisait sentir et j'avais une certaine réputation à défendre. Alors malgré la fatigue et mon agacement prononcé, j'avais la tête plongé dans mes révisions. J'entendais le vent souffler légèrement contre la vitre et j'apercevais les feuilles voler à travers la fenêtre. J'aime bien l'automne. La température se rafraîchit légèrement, mais j'ai toujours apprécié les couleurs de la saison.

L'esprit totalement focus sur mes études, je sursaute légèrement à la sonnerie de mon téléphone. Je l'attrape, la main encore légèrement tremblante. HA ! C'est Gamaliel ! Un grand sourire se dessine sur mon visage à mesure que je lisais son message. Un rendez-vous au muséum ? "Salut Gamy ! ٩(^‿^)۶ Ouai bien sur, ça me ferait plaisir de te voir, ça fait un moment qu'on s'est plus parlé. On rejoint la bas dans une petite heure ? ◔‿◔"
Je jette mes cours sur le côté et je fonce m'habiller. C'est vrai que ça fait un petit moment qu'on s'était plus vus et j'appréciais assez sa compagnie on peut se l'avouer.

En moins de 40 minutes j'étais prêt ! Lavé, habillé, parfumé et prêt à me lancer dans l'aventure ! Je traverse rapidement le quartier et me retrouve devant le lieu de rendez-vous en une dizaine de minutes. Je regarde rapidement ma montre. Ouf, je suis légèrement en avance ! Je m'adosse contre l'un des mur du bâtiment, balayant la foule des yeux à la recherche de Gamy le temps qu'il arrive.
Raté, c'est lui qui m'avait trouvé le premiers. Il s'avança la main tendu s'excusant de son retard. Un léger sourire éclaira mon visage tandis que je l'empoignais légèrement.

- Non t'inquiète pas, je viens d'arriver. On y va ?

Je lui fis un léger signe de la tête avant de me diriger vers l'entrée. Il était toujours aussi imposant que dans mes souvenirs, il ne rivalisait évidement pas avec le Metropolitan Museum dans lequel j'avais passé quasiment toute mon enfance, mais il avait un certain cachet que j'appréciais grandement.

- Tu préfères commencer par quoi ? Il parait qu'il vienne de recevoir de nouvelle pièce datant du règne de Marc Aurèle. On commence par ça ?

Pendant ma phrase je m'étais retourné vers lui et je le regardais, un grand sourire aux lèvres.

Gamaliel ne savait pas si son ami était sincère ou non en lui affirmant qu’il ne l’avait pas trop attendu mais, en tout cas, il n’avait plus besoin de s’en faire pour ça et se contenta donc de hocher la tête de manière à indiquer qu’il était effectivement près à aller visiter le musée et redécouvrir les œuvres qui y étaient exposées. C’était le genre de bâtiment que les passants remarquaient aisément, ne serait-ce que de part sa façade enjolivée et les colonnes ithyphalliques qui soutenaient l’entrée et rappelaient l’architecture européenne de l’Antiquité grecque et latine – annonçant d’emblée les thématiques abordées au cours des diverses expositions, si on ajoutait les civilisation du berceau de l’humanité.

 Les civilisations couvertes par ce musée s’étalaient vraiment sur une longue période de temps, en plus de couvrir un vaste territoire et il ne savait pas trop par où commencer la visite – surtout que les salles étaient configurées de manière à permettre aux visiteurs de ne pas avoir à passer par des sections qui ne les intéresserait potentiellement pas avant de rejoindre les œuvres qu’ils étaient venus voir. Gamaliel s’intéressait à tout cela sans pour autant être suffisamment passionné par l’une des civilisations pour la voir à tout prix. C’est donc avec soulagement que Bibi lui ôta le fardeau du choix de la première salle des épaules. Marc-Aurèle, ça lui allait très bien, il n’avait aucune raison de protester ou de refuser.

« - Je n’ai pas particulièrement de préférence, donc c’est bon pour Marc-Aurèle. Ça fait longtemps que je ne suis pas venu, donc je dois admettre que même si les pièces n’étaient pas nouvelles je ne m’en souviendrai peut-être pas. »

 Il n’avait pas de difficultés à s’exprimer. Il n’aurait sans doute jamais répondu comme ça à la plupart de ses connaissances, mais avec Bibi il savait qu’il n’avait pas besoin de s’en faire. Admettre qu’il ne savait pas vraiment où il voulait aller parce qu’il n’était pas venu depuis longtemps ne devrait logiquement pas poser de problèmes. Pas plus que de discuter d’histoire – ce qui avait plutôt tendance à endormir la plupart de ses connaissances.  De fait, il ne s’arrêta pas là et continua à parler – faisant à la fois ce que son camarade attendait sans doute de lui et ce qu’il voulait faire.

« - Par contre, je suppose qu’il faudra passer par l’exposition temporaire. Il me semble qu’elle explicite la manière dont l’irrigation et l’agriculture sumérienne ont entraînées la désertifications de leurs terres cultivables au cours des millénaires à cause du sel. »

 Parvenu au guichet, il présenta son pass annuel puis pris le temps de regarder le plan en attendant que son ami le rejoigne. L’aile consacrée aux civilisations romaine était sur la droite mais les salles dans lesquelles devaient logiquement se trouver ce que Bibi voulait voir étaient probablement à l’étage puisqu’il fallait auparavant passer à travers les collections dédiées à la Royauté romaine – qui était probablement mince - et à la République – qui elle devait probablement être plus fournie.

« - J’imagine qu’il va falloir monter à l’étage pour tout ce qui date de l’Empire. »

Ha mon dieu ce que ça me fait plaisir de parler avec lui ! Vous n'imaginez pas à quel point c'est horrible de parler à des gens de votre plus profonde passion et de ne recevoir en retours qu'un regard vitreux. C'est avec cette phrase que je me rappel pourquoi je l'aime autant. Quelqu'un qui vous comprend et qui partage vos centres d'intérêt est une chose merveilleuse a bien des niveaux. Je vais profiter un maximum de ma journée en sa compagnie !

- Bien sur, la fin de l'ère mésopotamienne n'est peut être pas mon époque de prédilection, mais leur culture est en soi extrêmement intéressante. On en profitera pour passer par l'exposition égyptienne avant, ça fera une bonne entrée en matière !

Je suis littéralement surexcité, ce qui peut sembler étrange pour une simple sortie dans un musée, mais je le répète, une sortie avec une personne comme lui est une chose malheureusement trop rare. Je suis tellement bloqué dans mes pensées à imaginer tout ce qu'on pourrait faire dans cette journée que je mets un certain temps à me rendre compte que je suis devant le guichet. Un peu gêné, je sors mon porte-feuille et tente un billet à l'employé. J'attrape rapidement le ticket qu'il me tend et cours légèrement pour revenir à son niveau.

- Désolé désolé ha ha !

Je le laisse m'expliquer où se trouve l'exposition puis, je lui attrape la main et l'entraine en direction des escaliers. En avant ! Excité comme une puce vous dis-je. J'arrive rapidement au premier étage, légèrement haletant la tête explorant tous les coins de la pièce.

- Regarde là bas ! Un répliquât de l'armure qu'il portait lors de sa guerre contre les Parths ! Et là bas, c'est le buste de Faustine ! Sa femme ! Et là bas, c'est une de ses fameuses statues équestre !

Incroyable, j'imaginais pas qu'un musée de cette taille habiterais des pièces de cette acabit !

Avec l’enthousiasme presque effrayant de Bibi pour le musée - et visiblement également pour le fait de passer du temps avec Gamaliel puisque celui-ci était en train de se faire trimballer sans prendre le temps de protester - il me semblait évident que le reste de la journée - ou plutôt de la visite - s’annonçait radieuse. De plus, les pièces que Gamaliel découvrait étaient probablement de nouvelles acquisitions puisqu’ils ne s’en souvenait pas et était même surpris de découvrir que le musée présentait des œuvres aussi rares. Il n’avait pas la même ferveur ardente que son ami - et l’enviait même sur ce point - mais appréciait également ce qu’il voyait.

 Sauf que l’idyllique réalité qu’ils s’apprêtaient à vivre ne pouvait évidemment pas se réaliser. Il aurait été impensable que leur visite au musée puisse bien se passer alors que l’alignement des planètes était de mauvaise augure - tant pour Gamaliel que pour Bibi. Ce qui devait arriver finit donc par se produire, et ce avant même que les deux compères ne puissent réellement poursuivre leur visite du bâtiment. Cet incident prenait la forme d’une jeune fille qu’ils connaissaient tout deux et en pinçait pour Bibi, ce que celui-ci ne savait probablement pas.

 Le cœur féminin - tout particulièrement lorsqu’il est jeune - étant ce qu’il est, la vue de Bibi avait naturellement fait flotter un sourire sur ses lèvres - et Gamaliel devinait qu’elle n’était pas non plus étrangère à la manière dont elle était en train d’ajuster avec attention les froufrous de sa robe. Lui ne la connaissait pas trop, mais il se souvenait tout de même avoir agréé lorsqu’elle lui avait demandé de l’aider à conclure ses affaires de cœur - et il commençait à le regretter parce qu’elle allait sans doute attendre de lui qu’il s’arrange pour que cette rencontre fortuite se transforme en quelque chose, même si Gamaliel n’avait pas envie de voir sa visite du musée interrompue.

 Il s’attendait donc à ce qu’elle leur adresse la parole ou le regarde avec insistance, comme pour lui suggérer qu’il ferait bien d’obéir à ses ordres implicites, mais le moment qu’il attendait ne vient pas et fut à la place remplacée par la vision d’un visage tout rouge qui se gonflait avant d’éclater en larmes et de tenter d’articuler une phrase qui ressemblait fort à un « Je ne savais pas que vous étiez comme ça ». Ce à quoi il aurait sans doute répondu qu’il ne comprenait absolument rien à ce qu’elle se disait si elle ne s’était pas élancée vers les escaliers au même instant, laissant tomber la boite de paillette qu’elle avait dans la main et bousculant Gamaliel au passage.

« - Qu’est-ce que ? »

 Manquant de tomber, l’étudiant réussit à se ressaisir à temps juste pour s’apercevoir qu’il n’était pas le seul à avoir été ébranlé par le choc, Bibi lui tenant apparemment toujours la main depuis qu’il avait manifesté son bonheur quant à sa présence dans le musée. Ce qui voulait certainement dire quelque chose mais Gamaliel n’eût pas le temps d’y réfléchir correctement qu’il tombait à nouveau, cette fois entraîné par Bibi.

Bon d'accord peut être que je m'emballe un peu trop. Désolé d'être aussi exité, mais comme dis précédemment je suis VRAIMENT content d'être là ! TOUT est parfait ! Que ce soit la qualité des pièces, le jeu de lumière pour les mettre en valeur et surtout l'aura qu'elle dégage. L'AURA ! Être là, au pied de cette immense statue qui me toise me fait ressentir l'effet que devait avoir les fantassins au côté de l'empereur. C'est fou de se dire que même 2000 ans après sa mort, un homme peut, grâce à l'art, continuer de dominer ceux qui l'entoure.

- Wow Gamy, t'as vus la finition du marbre ? On pourrait presque croire que c'est le véritable empereur qui c'est changé en pierre vue la qualité de l'ouvrage. Et je suis sûr que si j'avais le droit d'y toucher, je ressentirais quelque chose de très semblable à la sensation de la peau au niveau de ses bras et du visage.

J'étais littéralement extasié, je dévorais la statue des yeux, mon esprit était parti bien loin et je m'imaginais sur un quelconque champs de bataille en Arménie, massacrant les armées de Parths au côté du grand Imperator. Je suis malheureusement tiré de ma rêverie de manière assez brutale. L'esprit ailleurs je n'ai pas réagi assez rapidement lorsque qu'on me pousse brutalement par le bras. Pas le temps de comprendre, je m'agrippe à la première chose a porté qui n'est autre que Gamaliel. J'ai une courte seconde d'espoir avant qu'il ne trébuche et ne tombe avec moi.

Ouch. Je crois qu'on s'est cogné la tête. Je me frottais douloureusement la tête, regardant les alentours pour tenter de comprendre ce qu'il c'était passé, mais je ne vis qu'un nuage de paillette et la personne sur qui j'étais tombé, mon ami aka coussin, le bon Gamaliel. Honteux, je m'empresse de me me relevrt, époussète un peu ma tenue et lui tend la main pour l'aider à se relever.

- Désolé Gamy, je faisais pas attention... je t'ai pas fais mal j'espère ? Tu sais ce qu'il c'est passé ?

J'avais tourné légèrement la tête sur le côté, j'avais bien trop honte pour le regarder dans les yeux et ça se voyais surement à la couleur de mes joues.

Et voilà que le corps de Bibi se rapprochait à grande vitesse pour s’étaler sur lui – qui se prenait le sol de plein fouet en plus des côtes de son ami – et que la tête de celui-ci vînt percuter la sienne, comme pour achever de l’assommer et le mettre K.O. Et tout ça dans une salle qui, si elle n’était pas pleine, était tout de même occupée par plusieurs inconnus. Gamaliel mit du temps à reprendre ses esprits puis se relever, se massant légèrement les côtes d’une main tandis qu’il empoignait celle que lui tendait Bibi de manière à s’en servir comme d’un point d’appui. Étirant un peu son corps, histoire de se remettre les idées en place, il ne put s’empêcher de remarquer que la boîte à paillettes qu’il avait vu tout tomber tout à l’heure – et qui avait probablement été utilisée pour parfaire un maquillage qui devait être réduit à néant actuellement – restait abandonnée tandis que les deux hommes se retrouvaient couverts par quelques unes de ces paillettes qui ne voulurent pas s’enlever autant que Gamaliel essaya.

« - Je… Je crois savoir. Attends un peu, que je me remette les idées en place. Tant que c’est toi, ça n’est pas grave, tu n’as pas à t’en faire. »

 Ils étaient liés par une relation qui se voulait correspondre à de l’amitié. Alors il n’avait aucune raison de reprocher le choc à Bibi. Il l’aurait fait s’il s’agissait d’un inconnu, parce que ce n’est pas normal de se faire renverser par quelqu’un que l’on ne se connaissait pas. Il aurait râlé, grommelé, et serait parti ailleurs – à moins que l’autre personne ne se morfonde en excuses auquel cas il aurait fait en sorte de ne pas trop l’inquiéter. Mais là, même s’il n’était pas vraiment normal de crouler sous le poids d’un camarade, ils se connaissaient suffisamment bien pour qu’il soit tout naturel de lui pardonner.

 Quant à ce qu’il s’était passé, il était évident qu’ils avaient été bousculés par la fille qu’il avait aperçu. Et qu’elle s’était enfuie en larmes après l’avoir vue. C’était ridicule, mais la seule raison pour expliquer ce geste à laquelle il pouvait penser était qu’elle croyait qu’ils étaient venus ici en rendez-vous et étaient en réalité un couple, vu qu’ils se tenaient la main. Ce qui était un énorme raccourci et également entièrement la faute de Bibi – mais on ne pouvait pas lui reprocher d’être passionné par l’Empereur Marc-Aurèle. Même si la vie de ce dernier n’était pas ce qui intéressait le plus Gamaliel qui n’avait écouté son ami que d’une oreille. Il reprit donc les explications tout en pointant la boite à paillettes du doigt.

« - Elle était là. Une de tes camarades de classes que l’on connaît tout les deux mais dont j’ai oublié le nom. Robe à froufrous passée de mode, maquillage à paillettes. Je suppose que de nous voir alors que tu me tenais la main a glissé des idées bizarres dans son cerveau. »

 D’ailleurs, maintenant qu’il prêtait enfin attention à Bibi pour essayer de déceler ce que la pensée de la jeune fille pouvait déclencher chez lui – même s’il ne pensait pas qu’elle avait la moindre chance – il s’aperçut qu’il avait les joues rouges et évitait de le regarder. Sérieusement ?

« - Elle a oublié sa boite de maquillage du coup, il faudra peut-être songer à lui rendre. Et à arrêter de rougir. »

 S’il rougissait, peut-être que Gamaliel se trompait quant aux chances que pouvait avoir celle qui l’avait bousculé. Et s’il se trompait, cela voulait dire qu’il était peut-être mieux pour lui de tenir la promesse idiote qu’il avait faite. Après tout, d’après ce qu’il savait, Bibi était tout simplement libre comme du vent.

Une de mes camarades avec une robe a froufrous ? Sérieusement ? Il y a encore une fille en 2017 qui porte des froufrous ? Ok ben pourquoi pas hein ? Elle fais ce qu'elle veut la pauvre, j'ai pas à la juger... par contre le fait qu'elle est supposé des choses parce que je tenais la main de Gamaliel me fait rougir un peu plus. C'est idiot vu qu'il me demande l'instant d'après d’arrêté, mais comment voulez vous contrôler ce genre de chose ! Je veux dire, Gamaliel est juste un ami ! Et que quelqu'un nous imagine avoirs ce genre de penchant l'un pour l'autre est assez... déplaisant. Mais, comme il l'a dit, il faut aller lui rendre la boite qu'elle a laissé échapper, je vais donc prendre sur moi et me tenter de me calmer.

J'inspire profondément, tentant de remettre mes idées en place. En repensant à la scène il me semble bien avoir vus une fille à froufrous au moment ou nous somme rentré dans le hall. C'était quoi son nom déjà ? Ashley, Harley ? Héley ? Un truc comme ça je crois !

- T'as raison on peut pas vraiment garder sa boite, ni la laisser se faire de fausse idées d'ailleurs !

J'ai pas envie que la réputation de Gamy souffre de cette rencontre, surtout qu'en plus je suis apparemment la cause du malentendu ! Ce que (Marley peut-être ?) pense de moi m'importe assez peu au final, tant que je dissipe le quiproquo.

- T'as vus vers ou elle c'était dirigé ? Vers la sortie ? C'est ce qui me semblerait le plus logique en tout cas. Par contre la question que je me pose c'est que, quand bien même elle c'est fait de fausses idées, pourquoi est elle partie en courant ? Les femmes sont étranges...

Honnêtement hormis Heather, j'ai vraiment les plus grande difficulté du monde a comprendre la gente féminine et j'ai l'impression que c'est de pire en pire a mesure que nos vie s'écoule.

En supposant que Bibi puisse éprouver des sentiments pour la fille dont le nom ne revenait toujours pas à Gamaliel – ce qui était probable vu qu’il rougissait encore plus depuis qu’il avait mentionné le fait d’aller lui rendre sa boite, - il s’était résigné à ne pas poursuivre la visite du musée et à tenter de convaincre Bibi de rebrousser chemin un moment pour qu’une discussion ait lieu. Parce qu’il se fichait totalement d’elle, mais qu’il ne voulait pas handicaper son ami – même si celui-ci était la véritable origine de ses problèmes.

 Pour que Bibi puisse récupérer ses chances, il allait falloir que le quiproquo se résolve. Il ne comprenait toujours pas ce qu’il lui trouvait mais il ne pouvait plus vraiment expliquer la réaction de son camarade d’une autre manière. Ces rougeurs, cet embarras… Quelque chose dans sa tête lui disait qu’il imaginait mal les choses – parce qu’il ne parvenait pas à envisager Bibi avec quelqu’un comme ça, même s’il ne la connaissait pas vraiment – cependant Bibi venait d’accepter de lui rendre sa boîte. Le même Bibi qui s’extasiait tellement de la statue de Marc-Aurèle qu’il n’avait rien remarqué de ce qui se passait autour de lui. Le même Bibi qui voulait dévorer des yeux les œuvres du musée au point de l’attraper pour être sûr d’arriver plus vite dans les salles de l’exposition. Et le même Bibi qui s’était jeté sur son téléphone le matin même pour lui donner rendez-vous une heure plus tard – abandonnant donc tout ce qu’il était en train de faire pour le musée.

 Et voilà que la dernière preuve était apportée. Bibi se mettait à questionner le comportement des femmes, tentant d’y chercher une rationalité – et peut-être de tester ses propres hypothèses par rapport à celle-ci sans toutefois oser les lui avouer. Lui-même ne pouvait pas lui apporter les informations qu’il recherchait mais il pouvait toutefois être là comme support. Si Bibi était honnête avec ce qu’il voulait et le mettait dans la confidence. Après tout, c’est à ça que servent les amis, non ? À se soutenir lorsqu’ils ont des difficultés, lorsqu’ils hésitent, à se confier leurs problèmes de cœur. Normalement, être amis c’est tout ça. Tout ce qu’il avait lu pointait vers cette définition. Alors s’il ne voulait pas lui expliquer peut-être que… que Bibi ne le considérait pas comme un ami ?

« - Tu peux tout me dire, tu sais ? »

 Après avoir laisser échapper cette phrase, ses yeux se mouillèrent légèrement mais il se dépêcha de les essuyer. Cela ne servait à rien de tergiverser. Avec un peu de chance, il s’agissait encore de l’une de ces fois où lui, Gamaliel Collins, n’avait absolument pas compris ce qui était normal. Et si ça n’était pas le cas… il survivrait. Il secoua un peu la tête pour reprendre ses esprits. Pour l’instant il devait répondre à la question qu’on lui avait posé. Il le faisait toujours, après tout. Une fois la question posée, une réponse était attendue – pertinente ou non. C’était la norme.

« - Je crois bien qu’elle s’est dirigée vers la sortie. En tout cas, elle ne peut pas sortir par l’entrée, donc logiquement il faudrait aller voir la boutique souvenirs. »

Gamaliel réfléchissait un peu plus à la situation pendant que Bibi lui parlait. Au vu de sa réponse plutôt intriguée quant à son bien-être, il lui semblait que sa réaction du moment avait été tout bonnement absurde. Il fallait dire qu’il ne s’attendait vraiment pas à se retrouver dans une telle situation et que, confronté à quelque chose qui allait à l’encontre de ce qu’il s’imaginait être la norme, il avait réagi de façon brusque et émotive avant de se mettre à réfléchir concrètement au problème. C’était là une réaction humaine, mais il était gêné de perturber ainsi son ami. Il avait depuis longtemps appris que chaque être vivant était différent. Tout le monde apprenait cela. Et chacun suivait ses propres règles, pensait ce qui passait par la tête en oubliant parfois ce qui était normal. C’était dans l’ordre des choses qu’un enfant connaissant les notions de politesse oublie parfois, sur le coup de ses émotions, d’en montrer. Il ne pouvait logiquement pas attribuer ni son comportement ni celui de Bibi à autre chose que cela – il ne le pouvait plus, en tout cas, désormais qu’il comprenait sa réponse.

« - Je tenais vraiment à voir l’exposition sur les sumériens, oui. On n’aura qu’à se partager le prix de l’entrée si on est obligés de sortir du musée pour la trouver. »

 Ou alors ils pouvaient tout simplement l’abandonner là, mais l’étudiant ne pouvait se résoudre à le faire, parce que ça allait à l’encontre de plusieurs de ses règles personnelles. Même s’il n’en avait rien à faire de cette fille, lui rendre sa boite, résoudre le quiproquo, et donner sa chance à Bibi s’il voulait la saisir n’étaient que des réactions qui lui semblaient être normales, celles que n’importe qui suivrait dans cette situation. Enfin, pas tout à fait n’importe qui. C’était parfois assez délicat de savoir ce que feraient les autres lorsque l’on se retrouvait face à quelque chose d’aussi particulier que la diversité causée par les individualisations de la nature humaine. Alors il préférait faire en sorte qu’on l’apprécie, que l’on n’ait pas à se disputer avec lui, à lui reprocher de ne pas avoir fait ce qu’il avait à faire. Il se laissa tirer vers la boutique de souvenirs sans protester. Cela n’aurait servi à rien, de toutes façons – et puis, il n’était pas contre la démarche d’actions qui s’entamait.

 Gamaliel put rapidement apercevoir la disposition de certaines des salles du musée, voir ce qui était présenté sans pouvoir s’y attarder. Quelques tablettes d’argiles de Mésopotamie – il ne savait pas leur âge exact pour l’instant – étaient dans un état qui lui semblait remarquable, pouvant probablement être lues sans grandes difficultés pour peu que l’on connaisse la langue – et s’il s’était essayé au sumérien lors de ses études initiales d’histoire, il s’était bien vite arrêté pour commencer autre chose, probablement un peu de tennis qui n’avait pas duré non plus. La partie sur l’Égypte antique contenait quant-à-elle des momies d’animaux qu’il aurait souhaité pouvoir regarder plus attentivement – mais il reviendrait. Toutes les salles qu’il n’avait pas encore pu entrevoir lui promettaient sans aucun doute des chefs d’œuvres identiques à ceux-ci, ou peut-être même de meilleur qualité, si la personne qui avait monté les exposition avait fait son boulot correctement.

 Peu avant la boutique de souvenir, Bibi s’arrêta net. Une fille était en train de pleurer près du mur, dans un coin où elle ne gênait pas grand monde. Malgré le fait qu’elle attirait les regards, personne ne s’était déplacé pour lui demander si elle allait, voir ce qui c’était passé. Ignorer son prochain lorsque l’on était dans une foule – même si celle-ci était relativement éparse dans le musée – lui semblait être assez normal comme comportement, rien que personne ne sanctionne et qui ne paraisse étrange. Il aurait donc probablement fait pareil que les autres et continué son chemin s’il n’avait pas remarqué qu’il s’agissait de la même personne que tout à l’heure, ce que Bibi… ne remarquait apparemment pas ? À moins qu’il n’ait été en train de feindre l’ignorance. N’étant pas sûr, Gamaliel décida de lui souffler la réponse – qu’elle soit au moins donnée.

« - C’est la fille de tout à l’heure, Bibi. »

 Si son ami ne l’avait vraiment pas reconnue, cela voulait probablement dire qu’il s’était trompé. Que Bibi n’était probablement pas intéressé par celle-ci – sinon il serait capable de se rendre compte qu’elle était devant lui. Cela lui semblait assez étrange comme développement, mais il ne pouvait pas vraiment interpréter les choses différemment. Alors, pour l’instant, il décida de se taire et de voir ce qui allait être fait par son camarade. Ce n’était plus à lui d’agir, mais à Bibi. Et en fonction de ses actions, la vérité serait plus aisément compréhensible. D’ailleurs s’il n’avait pas de problèmes de cœur, cela renforcerait le fait que ses soucis d’un peu avant n’étaient absolument pas justifiés. Se mordant la langue, il se jura de faire en sorte de mieux se contrôler à l’avenir. Là, ç’avait été Bibi donc ça allait. Il était sympathique, pas totalement idiot, et ils étaient vraiment de bons amis. Mais avec quelqu’un d’autre, il aurait laissé échapper quelque chose qu’il aurait bien vite regretté – il ne voulait pas que les gens sachent ce qu’il pense. Après tout, il ne savait pas non plus ce que eux pensait, alors pourquoi est-ce qu’ils ne seraient pas tous égaux sur ce point ? Connaissant Bibi, son lapsus lui était passé par dessus la tête – et la réponse qu’il avait formulée au moment-là ne faisait que le prouver. Il sourit.

Bibi lui assura qu’il gérait tout – ce qui arrangeait bien Gamaliel qui ne voulait pas vraiment avoir à s’embêter avec tout ça – mais ne réussit absolument pas à tenir ses promesses. Première erreur, vouvoyer sa camarade de classe. L’étudiant ne savait pas vraiment s’il n’aurait pas fait pareil dans une telle situation – d’ailleurs normalement vouvoyer n’était pas un mauvais choix – mais le cœur des jeunes filles amoureuses semblait décider qu’il ne s’agissait pas là d’une manière raisonnable de communiquer de la part de l’objet de leurs émois, sans rien demander à personne. Restait que Bibi pouvait toujours se rattraper en infirmant la remarque de la jeune fille. Ce ne serait pas un mensonge puisqu’ils l’ont abordée spécialement parce qu’ils avaient reconnus en elle la propriétaire de la boite à paillette que Gamaliel tenait encore entre les mains. Sauf que visiblement l’ami de Gamaliel n’avait pas compris les choses comme lui et donna le genre de réponse qui blesse dans cette situation – même si cette fille aurait pu en profiter pour discuter, s’accrocher à Bibi, le séduire… quitte à être dans cette situation si elle avait été un peu plus intelligente.

 Gamaliel ne put s’empêcher de soupirer. Il était désormais sûr que son camarade n’éprouvait rien pour la jeune fille. Pour que le cas eut été contraire, il aurait fallu qu’il cache extrêmement bien son jeu, ne laissant rien apparaître en surface, pas même l’anxiété de tout à l’heure – mais pourquoi avait-elle été là au juste ? Le problème, c’est que l’étudiant n’était plus du tout sûr de la marche à suivre. Il n’était qu’un simple être humain banal, pas un personnage de roman qui aide les autres donc ça l’embêtait d’être là, avec cette fille qui les envoyait voir ailleurs, même s’il ne l’avouait pas et ne le montrait pas. Mais maintenant qu’ils étaient arrivés là, qu’ils lui avaient ramenée sa boite et qu’ils avaient commencé à lui parler, il ne savait plus s’il devait ou non continuer sur cette lancée. Etait-ce acceptable de tourner le dos, tout simplement, et de lui dire au revoir – sans jamais la revoir, probablement ? Il se devait au moins de lui rendre sa boite.

« - Ecoute, on est venus te rendre ta boite. Et on s’inquiétait pour toi vu que tu t’étais enfuie en pleurant, donc on voulait savoir si tu allais bien et ce qu’il s’était passé vu que l’on te connaît. » Commença-t-il, lui souriant légèrement sans trop se forcer non plus.

 Il était prêt à repartir avec Bibi dès qu’il lui aurait filé la boite cependant, il se devait tout de même de tenir ses promesses. Essayer un petit peu, en tout cas. Donc il décida de faire un effort ne lui coûtant rien, et se pencha sur elle de manière à être en mesure de lui parler sans que Bibi ne les entendent.

« - Tiens, voilà ta boite du coup. » lui souffla-t-il en la lui donnant avant de rajouter un « - Je ne suis pas avec lui donc tu as toujours tes chances, même si elles sont probablement minces. »

 Etait-ce cruel ? Probablement. Mais c’était ce qu’elle lui avait demandé de faire alors il n’avait plus vraiment de choix dans l’histoire. Essayer de lui arranger un coup. Tâter les eaux. Ce genre de trucs un peu idiots qui ne servent à rien parce que le meilleur moyen pour faire tomber quelqu’un amoureux est tout bonnement d’interagir avec une fois de temps en temps au minimum. Et pas de rester passif à attendre que les choses tombent du ciel.

 Il se retourna vers Bibi et lui lança un « - Puisque c’est fini et qu’elle n’a pas l’air de vouloir nous accompagner, est-ce qu’on retourne visiter l’exposition ? ». Parce que c’est vrai qu’il avait quand même vachement envie d’en savoir plus sur les Sumériens – même si cette envie ne durerait probablement pas si longtemps que ça.

La proposition de Gamaliel fut rapidement acceptée par son ami, qui décida donc de laisser sa camarade de classe tranquille dans son coin, à pleurer et se lamenter sur son sort si elle le voulait. Après tout, elle avait été froide avec eux alors qu’ils ne lui avaient rien fait, à part apparaître par surprise d’une manière qu’elle considérait sans doute inappropriée devant ses yeux. Elle les laissa partir, à l’étonnement du jeune qui aurait pensé qu’avec ce qu’il venait de lui dire et le fait que Bibi ait pris la peine de lui faire au revoir, elle aurait tenté quelque chose. Mais si elle voulait vraiment ruiner totalement ses maigres chances, Gamaliel n’allait pas l’en empêcher. Il y a des moments dans la vie où il est nécessaire d’accepter son sort, même si celui-ci est de se résigner à n’avoir aucune importance dans la vie de ceux que l’on aime. Il tenta tout de même un sourire et un signe de la main, comme Bibi, tout en se doutant que cela ne servait à rien.

« - L’Egypte c’est bien mais tout me va tant qu’on va voir les Sumériens. » Répondit-il en tentant de faire passer sa voix pour plus enjouée qu’il ne l’était vraiment après l’incident de tout à l’heure.

 Son sourire redevint naturel une fois quelques œuvres observées en compagnie de Bibi, et abondamment discutées avec celui-ci. Par exemple, cette momie de chat en provenance d’un musée du quartier Nord de Palema et qui avait été temporairement prêtée au Musée Bakkerfield. Elle était bien, intéressante, et probablement très appréciée des visiteurs puisque relative à un être félin, mais sa valeur historique et patrimoniale était bien inférieure à d’autres pièces de la pièce. Ce qui les mit d’accord sur le fait qu’ils étaient probablement dans un des meilleurs musées d’histoire de Palema. La diversité des pièces exposées permettait à un visiteur averti de ne pas toujours voir la même chose partout, et la structure des expositions permanentes était suffisamment réfléchie pour être digne d’intérêt sans même avoir à considérer les œuvres elles-mêmes.

 Finalement, ils arrivèrent aux expositions destinées aux civilisations les plus anciennes, celles du croissant fertile. Les Babyloniens, les Assyriens, les Akkadiens et, surtout, les Sumériens. Certaines œuvres étaient malheureusement des répliques, comme celle du code d’Ur-Nammu, mais d’autres étaient des pièces originales, exposées temporairement du fait de partenariats internationaux. On pouvait ainsi y trouver l’une des tablettes correspondant à l’épopée de Gilgamesh – en akkadien, malgré le fait qu’il s’agisse de l’histoire d’un roi d’Uruk. Autant dire qu’avec l’intérêt qu’avait Gamaliel pour cette période historique – même si cet intérêt n’était pas vraiment constant et ne lui semblait pas pouvoir constituer une passion digne de ce nom – il était aux anges, comblé par la visite. L’exposition temporaire étant le clou du spectacle, présentant des connaissances interdisciplinaires et transversales, ce qui permettait de montrer à correspondait réellement l’histoire, au-delà des livres, des témoignages, et des reliques.

 Naturellement, la visite commença à toucher à sa fin, et les deux amis finirent par retourner à nouveau près de la boutique, s’apercevant au passage que la fille qui avait perturbé le cours de celle-ci était déjà repartie, ou s’était enfuie dans un autre coin. Par rapport au reste du musée, la boutique était un peu décevante pour Gamaliel. Certains objets pouvaient être intéressants, mais il ne trouvait pas grand-chose lui plaisant. À la place, il découvrit qu’ils vendaient des couronnes de laurier, telles que portaient les romains, ce qui ne l’intéressa mais allait sûrement piquer l’intérêt de Bibi.

« - Hé Bibi, viens voir, il y a une couronne de lauriers par ici. » Lui lança-t-il.

La couronne de laurier que l’étudiant avait repéré intéressa son ami comme il l’avait pensé, celui-ci devant penser tant à lui-même qu’à sa sœur, Heather. Cependant, la boutique était tout de même assez décevante en termes de goodies pour des personnes comme eux, puisqu’il n’y avait rien dont Gamaliel n’ait réellement besoin, et qu’il ne savait même pas ce qu’il cherchait. Un souvenir n’était évidemment pas un objet historique, et il n’avait que faire d’avoir un stylo avec des hiéroglyphes alors qu’il avait déjà de quoi écrire chez lui, ou d’une peluche représentant une momie de chat et dont la qualité était douteuse. S’il voulait une peluche, il irait dans le magasin spécialisé de Palema, pas ici. Pareil pour les stylos, pour les gommes, ou pour les T-Shirts qui, s’ils auraient pu s’avérer intéressants, ne présentèrent pas de motifs attirant l’œil du jeune homme qui n’avait pas non plus particulièrement besoin de s’en acheter. Ainsi, la visite de la boutique ne permit pas à Gamaliel de trouver quoi que ce soit à son goût, ce qui n’était pas grave puisque la visite lui avait plu malgré l’incident imprévu qui était survenu au début de celle-ci et qui avait chamboulé légèrement leurs plans initiaux.

 Sortant du bâtiment après être passés par les caisses, pour que Bibi puisse s’offrir sa couronne, ils en avaient fini avec la visite du musée, ce qui marquait également la fin du programme qu’ils s’étaient fixés pour cette matinée de détente au milieu de leurs révisions – même s’il ne savait pas si Bibi n’avait pas pu en profiter pour réviser quelques-uns de ses cours, ne lui ayant pas vraiment demandé ce qu’il étudiait comme période. La plupart du temps, les cours d’histoire du cursus que suivait Bibi étaient plutôt axés sur des périodes plus modernes, ou tout du moins c’était le cas lorsqu’il y étudiait. Il n’était pas sûr des changements mais ceux-ci ne devaient pas être faramineux. Après tout, certains professeurs continuaient à faire le même test tous les ans sans se soucier du fait que leurs élèves récupéraient le sujet des années précédentes pour potasser celui-ci au lieu de leurs cours.

« - Je ne sais pas trop, mais on n’a qu’à dire bientôt. Il y a un autre musée dans le quartier nord, mais celui-ci devrait être de moins bonne facture malgré l’emplacement. Sinon on pourrait aller voir un film, j’ai entendu dire qu’il y en avait quelques-uns d’intéressants qui allaient sortir mais je ne sais pas lesquels. » Répondit-il à la question que Bibi lui avait posée.

 Naturellement, les deux amis se séparèrent rapidement après cela, en décidant de se revoir un peu plus tard et de se tenir au courant quant à ce qu’ils pourraient faire. Si Bibi voulait continuer sur une autre journée intéressante comme celle-là, ça n'allait certainement pas être Gamaliel qui allait refuser. Il n'aimait pas vraiment refuser les invitations d'ailleurs, même si c'était lui qui avait envoyé celle-là.