Appart’ de John:

Titre badass de sujet in english because it's better

John Fallen

la poignée de la porte tourne, se bloque, se retourne. J'entends même un petit jurons venant de ma bouche, je suis sur le palier, cette situation me fait sourire dans le noir. Le temps semble s'étirer et s’arrêter. Je savoure silencieusement le moment, comme une gamine qui s’apprête a arriver par derrière en hurlant "Bouh" pour faire tressaillir un de ses parents.



Venir chez John après notre entrevue s'était avéré un petit calvaire d’enquête qui m'avait pris tout mon temps libre pendant deux semaines entières. Déjà, j'avais googlé les deux nom de John Fallen, ou Théodore Brun.  A part m'apprendre qu'il était sensé être mort, je n'avais pas vraiment choppé grand chose. Mais au moins, j'avais mon dossier sur lui.
Alors, j'ai commencé les "Investigation sur le terrain" à trainer à mes heures perdu dans le quartier sud, d'abord par Google street view - Je suis pas non plus trop suicidaire, puis apres m'être grimée, avoir signé un testament et essayer d'aller une dernière fois expier mes 'hattaïm à la synagogue, j'ai commencé à trainer dans les rues, les bars de l'endroit. J'avais déjà envie de connaitre l'ambiance et les habitude de ce lieux que j'avais toujours fuie comme la peste. C'est jamais agréable de se retrouver en tête a tête avec la misère, ou de se sentir constamment en trop, comme si je craignais de pas être a ma place et que tout le monde le savait rien qu'en me regardant brièvement. Mais mon coté hypocrite m'avait permis de jouer les caméléons.
La première soirée ici, je l'avais fêté comme un raid militaire réussi.
J'avais commencé a ponctuer régulièrement mes expéditions par une visite Chez Duck. Juste histoire de connaitre les habitués et les gens auquel je savais que je plaisais, c'était étrange, mais j'aimais bien squatter.
C'était bien beau de se sociabiliser, de faire des rencontres. Mais après deux semaines a ne faire que du camouflage, j'étais en train de perdre la raison principale de ce pourquoi je venait souvent ici. Retrouver ce type.
Du coup, c'est sous le signe de cette soirée un peu tardive, je m'étais promené dans les rues familières. Et puis mon regard s'était perdu de manière attendrie sur un petit gamin des rue qui volait quelques trucs a un vendeur de fruit à la sauvette. Puis deux neurones ont connectés et mon cerveau a émergé du brouillard. Les gamins comme lui portaient habituellement des loques que l'on pouvait lointainement relier a des vêtements, ce gosse avait une doudoune usée et le vielle chaussure. Et un bonnet en laine.
Le bonnet était neuf.
Un truc tout con. Mais l’hiver arrivait bientôt, et mon intuition m'avait de le suivre. Il devait être un des gosse sous la protection encombrante de John. Le gamin a donc rapporté son butin dans un squat plus isolé dans la ville. Aux éclat de voix, j'avais deviné qu'il y avait que des gosses. Leur bavardages aigus était facile à suivre dans le silence inquiétant de la rue et la discutions m'avait indiqué qu'il venait de partager le butin. Rah... John Fallen qui inspire des gamins a devenir des robins des bois au détriment de leur sécurité. Tsss... Irresponsable, ces gamins pouvaient être plantés et mourir anonymement de la main d'un connard qui s'en foutait de la misère.
J'avais attendu un quart d'heure dans le froid, que le gosse reparte seul vers la rue principale pour engager la conversation. Je l'avais arreté pour demander tout de suite s'il connaissait John Fallen. Il avait l'air de se braquer, mais au moins, ça voulait que oui, ce gosse connaissait le nom que je venait de prononcer. Soulagement : les deux semaines que j'avais perdues n'avaient pas été perdu sur l’hôtel de la procrastination. Mettre en confiance le gamin fut pas ce qu'il y avait de plus facile. Mais j'avais réussit a le convaincre en lui parlant du vol de ma boutique, de l'eau que ses potes ont chopés grâce a cet argent. Bon j’admets, je l'ai fait en réarrangeant la vérité. Après tout, j'ai été sa complice, pas besoin de dire que si je l'avais aidé a chopper l'argent de la caisse, c'était parce qu'il me menaçait d'un couteau.
Après que le gamin soit en confiance, je lui ai offert au gosse 20$ et il m'a mené dans un quartier pourris ou le gars vivait.
Note a moi même : les gamins sont fouineurs et des sources d'information uber fiable dans le sud. Faut que je m'en souvienne dans le cas ou je dois chopper la trace de quelqu'un dans ce No man's land.
Une fois dans le hall, j'avais réussit a chopper le code parce que les quatres même touches étaient usée. Après 12 tentatives méthodiques, le bip suraigu m'indique que je peux rentrer. Une fois a l’intérieur, je choppe le numéros de sa chambre et le double de ses clef, d'une... certaine manière.



La porte s'ouvre et un filet de lumière verdâtre filtre du palier vers la petite piece. Tapis dans l'ombre, j’attends qu'il allume la lumière de l'appartement pour commencer a lui parler avec un sourire désarmant.

Salut Théodoux, ça fait un bail. Je suis venue te dire que j'accepte ce job si il y a encore des places à pourvoir.

J'avoue, je sais pas lequel de nous deux est le plus surpris de mon assurance. Mais je dois vite fait lui rendre le double des clés que j'ai emprunté. Après tout, ça ne m'appartient pas.

Mais j''y pense, je te rends le double des clés. Au fait, si le porc qui te sert de concierge te regarde de manière lubrique en parlant avec des sous entendus obscène, dit toi que au moins, j'ai apparemment viré la réputation de puceau que tu te trimballais dans l'immeuble."  

J'avoue que je me surprends un peu a être si acide, même si ca reste le jeu du sarcasme. Mais c'est vrai que je me retiens de rajouter des précisions. Vu la gueule du porkos de concierge quand je me suis fait passé pour sa copine, je crois que c'était l'incarnation de la jalousie. Nan, sérieux il a vraiment raté un jolie spectacle ce John.
Une fois passé la surprise, je sors de mon sac un thermos avec un sourire ironique.

J'ai un peu pris mon temps, mais voici ce café que tu me réclames depuis au moins quatre mois.

Bot Ninten

C’était inutile. John courrait, il gravissait cette colline avec toute ses forces ; et pourtant, inlassablement, une fois qu’il apercevait le sommet il glissait, et se retrouvait en bas. Pourtant, il recommençait même épuisé, il devait atteindre le sommet. Ils étaient là-bas, heureux. Ils y étaient tous, ils l’appelaient, scandaient son nom : « Théodore ! Viens jouer ! On t’attend ! ». Mais de sa bouche à lui, rien ne sortait… Pas après pas il sentait son dos s’affaisser, se scarifiait, il entendait ceux là-haut s’éloigner de plus en plus.
Alors il se laissa tomber. Son corps roula, il avait l’impression que c’était sans fin ; puis après un temps infini, il heurta quelque chose. Il sentit son corps se briser, sa colonne vertébrale le lâcher. Il était là, par terre, étendu comme un mort. Dans un effort surhumain il tourna ce qui lui resta de tête, et regarda ce qui le retenait. Alors il le vu. Lui. Son père le regardait d’un air hautain, il méprisait ce déchet à ses pieds, ce tas de peau sans vie.

« - Neuf ans que je te laisse un sursis de vie, et t’es toujours un raté, Théodore. Tu ne mérites même pas qu’on abrège tes souffrances, ce serait faire trop d’honneur à un être aussi pitoyable que toi. J’ai appris que tu as essayé de jouer aux héros et d’aider les gens. Toi ? Vraiment, il faudrait que tu te regardes avant de décider des choses. Tu n’as aucune valeur, Théodore. Tu n’as pas ta place dans ce monde. Tu aurais dû être à la place de John finalement, j’ai fait une erreur. »

Et il éclata d’un rire presque démentiel. Puis, en continuant sa folie, il frappa John. Il ne s’arrêtait pas, même quand John ne ressentait même plus le moindre de ses os ; il était comme possédé. Il leva à nouveau la main, banda son arc et décocha une flèche en direction de John.



John se réveilla brusquement, suant. Son regard était hagard, perdu ; il avait encore rêvé de son père. Comme chaque nuit, ce démon venait hanter ses nuits.

« Connard, jamais tu me lâcheras. »

Il fut très vite tiré de ses jérémiades par le bruit de la porte qui s’ouvrait. Il avait été découvert par la police ? Son père venait l’achever ? De toute façon il n’avait pas d’arme chez lui depuis sa mésaventure avec musclor, et il se résigna à allumer la lumière. Au moins il fera face à son agresseur.

« - Salut Théodoux, ça fait un bail. Je suis venue te dire que j'accepte ce job si il y a encore des places à pourvoir. »

John écarquilla les yeux. Son front encore brillant, il avait l’air tout à fait ahuri par la situation. Il connaissait cette voix, c’était celle de Nylian Hunt. Son esprit se remit à fonctionner correctement très vite : il devait reprendre son calme pour faire face à cette demoiselle. Il ne se le pardonnerait pas s’il perdait un duel de cynisme.
Alors, Nylian n’avait rien oublié de leur petite entrevue. C’était une mauvaise nouvelle, car alors ils étaient maintenant deux à savoir sa vraie identité ; deux fois plus de chance de compromettre ses plans en somme. A l’inverse, elle venait de lui dire qu’elle acceptait sa proposition, et c’était tout à fait inattendu. Il faut dire que depuis l’autre soir, John avait tout fait pour effacer les liens entre Nylian et lui.

« - Mais j''y pense, je te rends le double des clés. Au fait, si le porc qui te sert de concierge te regarde de manière lubrique en parlant avec des sous entendus obscène, dit toi que au moins, j'ai apparemment viré la réputation de puceau que tu te trimballais dans l'immeuble. »

Il esquissa un sourire. Il n’était même pas au courant que son immeuble possédait un concierge ; et apparemment Nylian le connaissait maintenant mieux que lui. S’il croisait ce concierge en compagnie de Nylian, il comptait bien mettre mal à l’aise Nylian pour se venger.

« - J'ai un peu pris mon temps, mais voici ce café que tu me réclames depuis au moins quatre mois. »

Elle avait sorti un thermos de son sac, et cette fois John rit. Non, vraiment elle n’avait rien oublié de ce soir-là, jusqu’aux détails. Et même s’il trouvait ça drôle, en même temps cela l’attristait un peu : elle avait choisi la solution qui lui attirerait des ennuis. Beaucoup d’ennuis. Mais maintenant qu’ils en étaient là, John n’allait pas la mettre à la porte en se montrant bienveillant. Non, ni elle ni lui ne voulait cela ; et cela promettait une belle soirée.

«  - Bien ! Tu as déjà pris la main pour les entretiens d’embauche à ce que je vois, le café c’est pas mal. Maintenant, tu as ton CV et ta lettre de motivation avec toi ? Il y a beaucoup de demandes pour devenir ma charmante associée, donc il me faut une bonne raison de t’embaucher sur le champ. Et non, que le concierge pense que tu as passé un entretien canapé ça ne suffira pas. »

Il esquissa un petit sourire, content d’avoir réussi à calmer son étonnement et à trouver une sorte d’assurance satisfaisante pour renvoyer la balle à Nylian. Comme à son habitude, il ne put s’empêcher de rajouter une dernière phrase, de trop :

« - Ah, et je préfère Théo-choux, c’est plus mignon tu vois. J’étais le charmeur de l’école primaire, tu sais, donc un peu de respect je te prie, Nylianette. »

Evidemment, il y perdait en crédibilité en rajoutant cela, mais il avait eu envie de répondre à toutes les pics de Nylian ; sans exception.

Derrière sa mine assurée et son phrasé presque arrogant, John était sceptique. Il se demandait pourquoi elle lui avait menti ce soir-là, et aussi pourquoi elle avait changé d’avis. Sa vie l’ennuyait ? Elle avait décidé de vouloir changer le monde ? Ou alors tout simplement avait-elle simplement besoin d’argent ? Ces trois solutions convenaient à John en fait, tout ce qui comptait pour lui c’était de ne plus être seul maintenant. Et Nylian n’avait pas l’air d’être égoïste au fond, il se disait même qu’il pourrait la rallier à ses opinions, à force de sorties…

John écouta les quelques longues tirades de Nylian, assis sur son lit. Il était impressionné par ce flot de paroles quasiment ininterrompus, avec comme seul but – en dehors des quelques sarcasmes-, de le convaincre à accepter Nylian comme partenaire. Cela l’amusait, car il ne pouvait concevoir qu’elle agisse sans se douter que John n’allait pas vraiment tergiverser sur sa candidature ; et ainsi tout cela était une sorte de mise en scène grotesque, quoi que bien ficelée. Il s’imaginait alors qu’elle avait peut-être besoin d’assurer sa prestance ce soir, de montrer que cette fois-ci John ne serait pas le dominant.

Il se laissa prendre au jeu, et au fil des phrases il se surprit à tirer une mine d’enterrement quand elle essaya de le menacer ; pas qu’il prit la menace réellement au sérieux, mais c’est plutôt le fait qu’elle joue son rôle absolument à fond qui le laissa sans voix. Il se demandait en fait si elle jouait un rôle ou si elle essayait vraiment de lui mettre le couteau sous la gorge pour ne pas lui laisser le choix la finalité… Et étrangement il se dit que ce n’était finalement qu’un juste retour des choses : cette fois il était le braqué. Et comme elle fit par le passé, il n’allait pas se retenir d’aggraver sa situation en abusant de quelques pics sarcastiques bien placées.
Elle riait beaucoup, et cela rassura John. Il avait peur qu’elle soit venu par désespoir, ou prise de remords ; et apparemment ce n’était pas le cas, elle avait l’air d’être là de son propre chef. John avait tout de même des doutes sur les ambitions philanthropes et sociales de Nylian, mais ce n’était pas son rôle de la juger. Il allait simplement apprécier son aide, qui allait faciliter ses petites activités.

« - Au fait, je suis complètement crevé et j'ai esoin de de dormir quand je rentrerai chez moi, tu m'en voudras pas s'il est décaféiné ? »

Comprenant que son speech était terminé, John rit franchement et trinqua avec elle. Un individu entrant dans la pièce s’étonnerait sûrement de cette situation, deux personnes qui ne se connaissaient pour ainsi dire presque pas, l’un en caleçon, l’autre vêtue comme si elle était encore dehors, trinquer en riant à un accord sans sens au beau milieu de la nuit.
Alors John se leva, posa son verre sur le sol, et alla récupérer quelques affaires qui trainaient au pied du lit pour les mettre. A vrai dire, on était presqu’en hiver et John n’avait pas de chauffage ; et hors du lit il avait quelque peu froid.

« - Bien joué Sherlock, tu as presque tout bon, à un détail : je n’ai emprunté que le prénom, Fallen c’est mon invention. Parlons un peu de ton embauche mademoiselle la menace, je te concède que je sens la motivation dans tes paroles ; je ne m’attendais pas à un tel entrain de ta part à l’idée de passer tes nuits avec moi, j’en suis flatté. »

Une fois habillé, il retourna s’assoir sur le lit, empoignant à nouveau ce qui lui servait de verre, regardant Nylian d’un regard qui ne trahissait aucun rire.

« - Soyons sérieux deux minutes, Nylian, on aura tout de le temps de rire après. Mais avant de prendre une décision, j’aimerais savoir ce qui t’as décidé à revenir sur tes choix. En soit, ça me plaît que tu ais changé d’avis, mais qu’à tu as y gagner dans l’affaire ? De l’argent, une conscience ? Ou simplement de quoi t’occuper la nuit ? »

Ce soudain sérieux était nécessaire à John pour reprendre l’énergie suffisante afin de continuer ses petits échanges avec Nylian. Malgré l’assurance qu’il voulait montrer à Nylian, intérieurement il avait du mal à être tout à fait calme. A vrai dire, son cauchemar et la fausse menace de son invitée avait ravivait le stress qui sommeillait en lui quant à sa proche aventure chez son père ; et il avait besoin de calmer l’atmosphère quelques instants, avoir un petit moment de répit pour faire disparaître ce léger tremblement qui avait commencé à se propager sur son corps.
Il ne voulait pas qu’elle le voit, il ne voulait pas qu’elle méprenne sa réaction. Il comptait reprendre de plus belle son sarcasme, mais seulement quand elle lui aurait répondu. Une fois le côté sérieux de l’affaire réglée, ils pourraient s’adonner à leur activité favorite.

Nylian souriait, paraissait presque enjouée à l’idée de cette sorte d’alliance ; et pourtant John n’était pas dupe. Il avait très bien compris qu’elle avait accepté sans vraiment savoir pourquoi, et sa réponse vague confirmait ses doutes. Alors, lui aussi dissimula ses craintes et ses états d’âme derrière un sourire. En somme, un beau face à face d’hypocrites.

« - Oui, je le veux. »

Il avait décidé de continuer le jeu du faux romantisme, qui se prêtait étrangement bien à cette situation.
En fait, John ne savait pas quoi faire. Ils étaient là, trinquant à leur partenariat récent, muets. Il ne savait pas quoi dire, il ne savait pas par quoi commencer : lui demander de partir ? La raccompagner ? Discuter d’un sujet banal, pour mieux la connaître ? Il hésitait, et aucune de ces options n’était convaincante à ses yeux.

« - Ma dernière attirance avait plus de 25 ans et c’était pas une femme. Maintenant à ton tour de me parler de toi, je veux savoir avec qui je vais passer les vingt prochaines années dernière les barreaux, ça serait cool. »

Il savait qu’elle allait se moquer de lui, mais c’était le risque à prendre, en quelque sorte un échange de bon procédés. Parlait de Fox était douloureux pour John, étant donné qu’il n’avait toujours pas saisi la nature de ce béguin ; cela avait été fort et soudain, puis s’était effacé en quelques secondes, comme s’il ne s’était rien passé. Et même avec du recul, il n’arrivait pas à expliquer cela, ce n’était pas de l’amour. C’était… autre chose.

John rendit sa tasse, vide, à Nylian, puis se leva pour ouvrir la fenêtre. Son stress était en train de redescendre, le climax était passé. Maintenant, ses pensées commençaient à être envie par l’idée du sarcasme. Enfin, par l’idée de l’absence de sarcasme : ses idées sérieuses l’avaient tellement envahi ces quelques derniers instants, qu’il en avait oublié son petit jeu avec sa nouvelle partenaire. Maintenant que la partie sérieuse s’était déroulée sans encombre, il lui fallait combler le gouffre d’humour qui s’était creusé entre elle et lui ; c’était l’heure de la partie plaisante de la soirée.

En attendant que Nylian daigne – ou non-, se confier, John chercha de l’inspiration en regardant le ciel. Il était vide de nuages ce soir-là, les étoiles étaient prêtes à être admirées. Alors, il passa son attente à s’y perdre.

« - Ma dernière c'était une fille dans la vingtaine. J'ai toujours eu un faible pour les cheveux bleus. »

A vrai dire, John était au courant de l’attirance de Nylian envers la gente féminine ; au gré de ses soirées à suivre Nylian il avait bien fini par remarquer qu’en général, ce n’était pas des hommes qu’elle avait au bras. Et à vrai dire, cela ne le dérangeait pas, il ne cherchait en elle qu’une partenaire de vol, pas une partenaire de vie ; quoiqu’il ne pouvait pas nier sa beauté. Enfin, ce serait le genre de sujet qu’il n’aborderait jamais, loin de lui l’idée de la complimenter.

« - Sinon, je veux pas casser ton délire lyrique, mais il y a pas d'étoile dans le ciel. La lumière de la ville pollue trop et du coup tu ne vois que des avions. Après, si ça compromet ton fragile équilibre mental, je veux bien retirer ce que j'ai dit et je te laisse croire que c'est des étoiles
Sinon, m'en veut pas, mais ca boost le charisme d'un personnage quand il reste vague sur son passé. Deal with it, il te faudra probablement au moins quatre autres plans d’orchidées pour me pousser a me confier sérieusement. »

A mieux y regarder, John se rendait effectivement compte qu’il n’y avait pas la moindre étoile dans le ciel. Sauf qu’il n’y accordait pas grande importance à vrai dire, il avait fait seulement cela pour établir une certaine distance entre Nylian et lui ; comme cela elle n’aurait pas l’impression d’être étouffé par la curiosité de John. Enfin, c’était inutile finalement, mais au moins il aurait eu le mérite d’avoir essayé quelque chose. Et John n’avait pas l’intention de lui offrir des fleurs de plus, sinon il n’en aurait pas fini avant des mois.

« - Tu casses l’effet Baudelaire, là. Bref, mademoiselle j'sors-des-expressions-c'est-la-classe,  qu’est-ce que tu comptes faire maintenant ? Tu veux que j’te fasse une place ici dans mon super batappart’, ou tu préfères repartir dans ton vide grenier ? Et si t’espère que j’suis galant au point de te ramener jusqu’à chez toi, j’espère que t’auras autre chose que du déca’ à me proposer. »

Et sur ces mots, il vint se rassoir sur le lit, l’effet recherché ayant été avorté. L’heure tardive jouant, il mit quelques instants puis se souvenu qu’il lui faudrait peut-être un moyen de contacter cette demoiselle ; alors il sorti son téléphone pour la laisser enregistrer son numéro. Evidemment, cet engin préhistorique n’avait quasiment jamais servi, et un de ses rares contacts – en dehors de quelques informateurs véreux-, était Leeroy ; il n’était donc pas étonnant que John ne connaisse pas son numéro.

John regarda Nylian, quelque peu décontenancé par ses menaces et insinuations. D’abord, il n’était pas gay, et puis il voulait vraiment du café. Enfin, si elle souhaitait s’aventurer sur ces terres-ci, John pourrait la servir, après tout il n’avait pas l’intention de se laisser faire par cette demoiselle, et comptait bien lui rendre la monnaie de sa pièce sur chacune de ses répliques. Il se demandait d’ailleurs si elle se méfiait réellement de lui, ou si c’était aussi son sarcasme.

« - En vrai, si on a bien un point commun, c’est qu’on aime les femmes tous les deux. Et je parlais vraiment de café, mais ça me flatte que ton imagination vagabonde vers ça avec moi. J’en rougirais presque. »

Restait à voir si elle allait vraiment tenter de lui mettre un joli coup à la Alice, ou si elle se contenterait de l’attaquer à coup de sarcasme. La seconde option lui plaisait plus, elle serait bien plus amusante pour lui ; la dernière qu’ils s’étaient battus, ce n’avait pas été très glorieux.
Elle partit dans un coin s’assoir et sortir un livre, et cela l’intrigua quelque peu. Il se l’était imaginé hédoniste, musicophile et amatrice de thé, mais pas comme une sage lectrice. Il alla s’assoir sur le bout de son lit, le plus proche d’où elle était, puis tenta de lire la couverture du dit livre. Il n’avait jamais lu de Terry Pratchet, mais ce nom ne lui était pas étranger ; peut-être était-ce un des livres de Mary quand il vivait encore chez elle ? Ou peut-être l’avait-il simplement vu lors d’une de ses sorties ? Peut-être ni l’un, ni l’autre, ou les deux à la fois, il ne savait pas. Quoiqu’il en soit, la lecture lui était aussi agréable, même si à part une édition de Robin des Bois aucun n’ouvrage n’était trouvable chez lui. Trop cher, et il avait assez de respect envers la littérature pour s’interdire d’en voler un.

« - Ca parle de quoi ? J’connais que vite fait, j’ai jamais lu de Pratchet. Et si jamais l’envie te prend de dormir, prends mon lit, j’peux m’allonger par terre sans problème. Profite de cet élan de gentillesse, ça arrivera pas souvent. »

Quoiqu’il dise, leur accord de ce soir l’avait mis de bonne humeur, et même s’il aimait beaucoup l’inonder de sarcasme, un peu de gentillesse ne le tuerait pas. Enfin, si elle refusait, il n’irait pas insister plus ; il n’avait pas non plus une volonté sans limite.

John ne prit pas compte de la première remarque de Nylian, car il devait avouer qu’elle avait raison. Après avoir parlé, il s’était rendu compte du tact absolument monstrueusement absent de ses paroles, et se désolait d’être toujours aussi mauvais de ce côté-ci. Il lui faudrait travailler ce côté-là les semaines à venir, car dans le cas contraire sa partenaire pourrait aisément gagner leurs petites joutes en invoquant ses talents d’orateur.
A sa surprise, elle avait consenti à présenter son livre, quoique de manière très succincte et approximative, mais cela suffirait à John. Cela pourrait servir de sujet presque sérieux de temps à autres, afin de leur laisser le temps de recharger leurs armes à sarcasmes ; même les plus doués avaient besoin de temps pour trouver l’inspiration, parfois. A la fin de ce petit résumé, John descendit de son lit et s’assit contre, la tête posée sur la tranche de ce qui servait de matelas.

« - Ça a l’air complétement barge. Mais ça me plait. Tu pourras me le prêter ? Et prends pas peur, si y a bien un truc que je vole pas, c’est un livre. »

Soudain la soirée chez la jeune Armani lui revint en tête, et il se décida à revenir sur ses propos, quoiqu’en essayant de mesurer ses paroles.

« … Sauf une fois dans un chalet. Et encore, je l’ai pas volé au final. Mais c’était un cas différent, et puis j’en ai honte, enfin pas les livres quoi. Bref, revenons à ta pizza. T’as faim ? J’ai p’tête deux trois trucs qui traînent. »

Il avait laissé couler la pique de Nylian sans y prêter attention ; d’habitude elle  y allait plus finement, avait-il déjà commencé à l’influencer ? Cette pensée le fit sourire intérieurement, car s’il en arrivait à se faire apprécier par cette fille, ce serait une sorte d’exploit. Elle avait l’air de tellement de le mépriser qu’il en trouvait ça comique.
C’était une relation très différente de celle avec Leeroy, car beaucoup plus compliquée à construire : il était parti sur de très mauvaise base, mais l’humour y était très présent. John se surprenait à s’imaginer s’en faire une seconde amie, même s’il se disait que c’en serait dangereux. Si jamais ils se faisaient attraper, il fallait que Nylian puisse porter plainte contre John sans remord. Il était l’unique responsable de tout cela, et elle n’avait pas à prendre avec lui.

Nylian avait consenti, et John lui adressa un sourire en remerciement. Développer sa culture avec de la littérature plus actuelle que Robin des Bois ne lui ferait aucun mal, et, qui sait, il pourrait même apprécier cet auteur. Enfin, il prendrait le temps de s’attaquer à ce livre qu’une fois l’affaire avec son père terminée ; il avait trop à faire d’ici là. Il lui fallait d’ailleurs réussir à planifier un vol avec Nylian avant cet événement fatidique, mais il s’occuperait de cela le lendemain.
Même si elle prétendait ne pas dormir cette nuit, il allait quand même lui laisser lit ; dormir par terre n’était pas si désagréable quand on en avait l’habitude. Il se leva, alla chercher un habit qui traînait sur le lit et en fit une petite boule. Il s’assit contre le lit à l’opposé de la demoiselle, callant son oreiller de fortune entre sa tête et le matelas.

« - Merci. Bonne nuit, t’as le lit si ton insomnie te lâche. Je sais, ça manque un peu de sarcasmes tout ça, mais je viens de me lever j’te rappelle. Allé, salut camarade. »

Il ferma les yeux. La nouvelle de cette nuit avait été très appréciable, et il se rendormait dans un autre état que celui dans lequel il s’était réveillé, à peine une demi-heure auparavant. Passer de Georges à Nylian était radical, c’était comme passer de la peste à la grippe ; du second on pouvait en réchapper, mais c’était casse-pieds quoiqu’avec quelques avantages. C’était une bonne définition de la jeune fille selon la vision de John, à vrai dire.
Puis il s’endormit.